J’ai lu avec intérêt vos analyses selon lesquelles l’Europe avait ouvert en grand ses portes aux automobiles chinoises et que ses normes environnementales sans nuances risquaient d’avoir des effets dramatiques sur l’emploi en Europe, et en France en particulier.
Avec tout le respect que je dois au redresseur des marques Peugeot et Citroën, je tiens quand même à vous exprimer mon étonnement et mon incompréhension vis-à-vis de votre propre politique au regard de la production en France.
En tant que consommateur, soutien inconditionnel du « made in France », je suis très en colère contre vos choix industriels.
La production de véhicules en France se réduit comme une peau de chagrin. Plus aucune petite voiture Peugeot et Citroën n’est faite en France (alors même que Toyota montre que la chose reste possible dans des conditions de rentabilité satisfaisante ). Pire, la maladie monte en gamme. Les nouvelles et superbes DS4 sont faites en Allemagne, la C5-X est chinoise. Pire, le fleuron de la gamme, vitrine de la marque et du savoir-faire français en matière de luxe, la sublissime DS9 est purement chinoise, ce qui la prive de rentrer dans les garages de l’Elysée.
Ce faisant, vous vous privez de clients fidèles qui sont déstabilisés par ce manque de solidarité avec la communauté nationale. Si vous aviez été en poste à cette date, la fameuse DS, quintessence de l’automobile française, n’aurait pas sauvé le Général lors de l’attentat du Petit Clamart!…
En tant qu’actionnaire de Stellantis, je comprends votre travail sur les coûts et je l’apprécie. Mais pourquoi l’industrie française, réputée en matière de luxe, ne pourrait-elle pas tenir la dragée haute aux compétiteurs allemands qui restent très majoritairement attachés au « made in Germany ». Un pays pourtant qui n’est pas low cost…
Vous pouvez donc critiquer nos hommes politiques pour leur angélisme face à la Chine. Mais vous-même avez fait entrer le cheval de Troie dans la place !
Pour l’acquéreur d’un véhicule français haut-de-gamme, le choix est quasi limité à la DS7. Mais là encore, votre politique commerciale est incompréhensible. Vous limitez la voiture à des modèles hybrides haut-de-gamme, limitant donc ses ventes. Certes, vous avez des contraintes en émissions de CO2 à respecter. Mais pourquoi ces normes d’émission sont-elles plus rigoureuses que chez Alfa Romeo où le Diesel et l’Essence subsistent pour la Stelvio ? Vous voudriez tuer le dernier modèle de luxe fait en France que la stratégie ne serait guère différente…
Si votre management du groupe n’appelle que des louanges sur le plan financier, je suis consterné par l’absence de défense des intérêts industriels français. Vous ne pouvez pas appeler les pouvoirs publics à un sursaut, si vous ne montrez pas vous-même l’exemple. Surtout quand cette politique incite des clients fidèles à s’éloigner, et à retrouver dans les « voitures de collection » l’attachement à une marque qui étaient la leur.
Pour finir, peut-être tout cela ne tient-il qu’à un manque de compétition flagrant du « Standort Frankreich » aux dépens de l’Italie et même de l’Allemagne ? Mais alors, ne vaut-il pas mieux sonner l’alarme auprès de la classe politique pour obtenir l’égalité de traitement social qui prévalait avant les 35 heures ? Seuls des industriels tels que vous, qui comptent encore quelques dizaines de milliers d’emploi industriels dans notre pays, seraient qualifiés pour faire entendre la voix de l’industrie. Une industrie tombée à 11% de notre PIB, très loin des 22% de l’Italie. On tremble à la pensée de ce qu’un groupe multinational, présent des deux côtés des Alpes, pourrait en conclure en terme d’organisation industrielle