Tous les articles par Bernard

Borg/McEnroe : duel au sommet…

Le film est surtout un bain de jouvence pour replonger dans ses jeunes années. Qui ne se souvient pas de cette finale 1980 incroyable où le nom du vainqueur semblait l’enjeu d’une rivalité entre les dieux ? Apollon du côté de Borg, demi-Dieu viking vénéré des filles qui était d’un calme olympien. Dionysos du côté de McEnroe, roi de la folie et de la démesure qui promenait une réputation de sale gosse mal élevé, « superbrat » pour les English, soit « sale morveux ».

Je me souviens bien de ce match et de son indécision totale. Sans doute un des plus grands matchs de tennis de tous les temps. Fallait-il en faire un film, selon cette mode tyrannique du biopic qui veut remettre en image toutes les célébrités passées? Continuer la lecture de Borg/McEnroe : duel au sommet…

« L’Enigme de la Diane », dans le bain de la Royale

Je suis toujours impressionné quand un auteur arrive à marier deux talents : le talent du raconteur d’histoire avec celui de l’historien. Ecrire sur une période qui n’est pas la sienne n’est pas un exercice mineur. Il faut préalablement se rebaigner dans l’époque, collecter des informations, lire des écrits de l’époque, retrouver l’esprit du moment, et parfois aussi la langue. Tout en trouvant une trame qui puisse capter l’attention du lecteur contemporain. Un sacré défi…

Nicolas Grondin, breton d’origine, passionné de livres, s’est attelé à la tâche en 2010 avec un roman visant à ressusciter la Marine Royale de Louis XVI, « L’Enigme de la Diane ». L’histoire d’un jeune garçon, embarqué de force dans une frégate royale en mission pour les Antilles, qui va découvrir la vie de marin sur un navire de guerre où la vie humaine ne pèse pas lourd, mais qui sait faire naître une incroyable solidarité.

Ce livre est incroyable Continuer la lecture de « L’Enigme de la Diane », dans le bain de la Royale

Sur les traces du grand Charles…

Partir pour Colombey-les-deux Eglises, c’est comme une expédition lointaine… L’Aube et Troyes sont des paysages de connaissance, mais au-delà de la Forêt de l’Orient, en poussant plus à l’est, on s’enfonce dans un département français rural, forestier, peu peuplé, qui semble ne guère avoir bougé depuis des siècles : la Haute Marne ( 52 )… Ses villes, Langres, Saint Dizier, Chaumont fleurent bon la France profonde, mais ces lieux ne sont guère des points d’attraction, ni des étapes vers d’autres lieux…

C’est pourtant dans ce coin de France que notre plus grand Président, Charles de Gaulle, s’est enraciné. Il goûtait à son silence et à sa ruralité. C’est là qu’il est enterré, près de sa maison, la Boisserie que nous connaissons tous de nom. Son repaire, Colombey les deux Eglises, village au nom étrange, a souvent éveillé ma curiosité, quand j’étais enfant. Il m’a fallu longtemps pour que je me décide enfin à assouvir cette curiosité… Je n’ai pas été déçu ! Continuer la lecture de Sur les traces du grand Charles…

Sus aux butors !…

L’affaire Weinstein provoque un raz-de-marée incroyable dans notre société. C’était comme si une digue avait cédé, la digue de l’omerta et de la honte. Les femmes se mettent à parler, à dénoncer, à montrer du doigt les hommes aux pratiques indignes. Le harcèlement sexuel est partout, et on voit tomber comme au champ de foire les têtes d’un acteur, d’un homme de radio, d’un producteur, sans parler d’hommes politiques qui avaient déjà suscité l’opprobre pour leur tyrannie auprès de leurs collaboratrices.

On savait que le monde des starlettes était celui des faveurs sexuelles monnayées. C’est un choc de découvrir qu’une star mondiale comme Juliette Binoche a expérimenté des pressions similaires, sans vraiment découvrir si elle y a cédé ou non. Le monde des médias est-il si pourri ? Continuer la lecture de Sus aux butors !…

« Au revoir, là-haut » : simplement parfait…

C’était évident !… Le prix Goncourt 2013 de Pierre Lemaître était un tel enchantement qu’un film devait suivre. Oui, mais pas n’importe quel réalisateur. Le livre était dense, profondément humain et comportait sa part de subversion et de douce folie qu’il fallait préserver. Albert Dupontel semblait taillé pour un tel défi. Et force est de reconnaître qu’il s’en acquitte superbement…

Sa réalisation est riche, et en même temps concentrée sur l’essentiel du roman. La scène de guerre du début, d’une extraordinaire sauvagerie campe bien le récit dans son jus psychologique. De même, le songe du jeune mutilé dresse en quelques jolies images sépias les relations familiales tendues qui sont le ressort essentiel de toute l’action. Bravo Continuer la lecture de « Au revoir, là-haut » : simplement parfait…

Des mots pour le dire…

Le Point de cette semaine titre sur les menaces pesant sur la langue française. Vaste sujet ! L’interview d’Alain Borer dans ce même magazine mérite vraiment le détour. Il a, à mes yeux, parfaitement raison… Au delà des emprunts à l’étranger qui font partie de l’évolution naturelle d’une langue, notre français est envahi par ce qu’il appelle « l’angloglobal » qui vise à se substituer à notre langue par l’invasion de mots qui font plus branchés, plus dans le coup et éclipse gentiment nos propres mots. Ainsi en est-il de « booster » « positive attitude » »low cost » « selfie » « silver economy » « spoiler »… La mondialisation est passée par là et sa conséquence naturelle, la colonisation de l’anglais dans les milieux économiques. Hélas, elle s’élargit aux autres sphères de la société comme une encre noire sur un buvard tendre.

Les tentatives de résistance sont faibles ( « courriel » pour désigner un mail ) car, à l’inverse de nos amis canadiens, nous n’avons pas la passion de notre langue chevillée au corps. Continuer la lecture de Des mots pour le dire…

Kingsman : nouvel opium du peuple…

Une nouvelle franchise du cinéma d’action est née : Kingsman 2 confirme les promesses du 1 ! On n’avait plus vu cela depuis Jason Bourne… Honnêtement j’ai pris autant de plaisir à ce « Cercle d’Or » qu’au premier opus, même s’il n’y avait plus l’effet de surprise du ton décalé. Assurément la griffe de la marque !…

Kingsman 2 se renouvelle bien, tout en faisant des jolis clins d’oeil au premier numéro avec, en particulier une bagarre dans un bar qui rappelle quelque chose… Dans le même registre, il y a aussi l’exploitation identique du thème des addictions populaires : le téléphone mobile dans le premier, les drogues douces et dures dans le second. Kinsgman tisse sa trame en exploitant nos faiblesses, et le fait avec toujours ce petit ton de dérision qui rend le propos irrésistible. Continuer la lecture de Kingsman : nouvel opium du peuple…

Quand le théâtre fait hurler… de peur !

« La Dame blanche », voilà assurément un joli moment de théâtre. Un spectacle qui sort de l’ordinaire, puisqu’il se place dans le registre inhabituel au théâtre de l’épouvante. Le spectacle vivant peut-il faire peur aussi bien que le cinéma ? Bien sûr que non, mais il peut tout au moins y prétendre avec un certain bonheur, à l’image de cette Dame Blanche.

Et quand les moyens techniques prêtent leur concours, ma foi, on peut se laisser prendre. D’ailleurs, c’est sans doute la première fois que le théâtre de la Renaissance a connu des cris aigus de femmes surprises par la présence de spectres au milieu des spectateurs qui s’installent. Le théâtre se remplit donc dans une mêlée incroyable, avec des cris, des hurlements sauvages et des mouvements de foule et c’est déjà en soi un spectacle. Pour mieux profiter de la chose, Continuer la lecture de Quand le théâtre fait hurler… de peur !

« L’école buissonnière » est belle…

Nicolas Vanier, explorateur du grand Nord et amoureux fou de nature sauvage, a voulu démontrer que le sauvage n’était pas nécessairement lié au voyage lointain. Il est à nos portes, en Sologne en particulier où a été tourné ce film de fiction naturaliste.

« L’école buissonnière » est avant tout un carnet de cartes postales, magnifiques, magiques, splendides ( les mots manquent…) sur les animaux de la forêt : cerfs, biches, renards, lapins, oiseaux de toutes sortes. On se demande parfois comment les images ont été tournées. C’est très dépaysant pour les citadins que nous sommes, et le film mérite à ce titre le déplacement.

Mais l’histoire ? Continuer la lecture de « L’école buissonnière » est belle…

Je suis un (nouveau) macroniste !…

L’interview d’Emmanuel Macron, ce dimanche soir, sur TF1 a été un grand moment de communication politique. Un très bel exercice qui a achevé de me convaincre que nous avions un grand président. Un homme que j’ai pourtant combattu lors du premier Tour de la Présidentielle. Mais le temps a passé. L’homme se bonifie; il s’est glissé habilement dans les habits de la fonction. Il a poli son discours au contact de la réalité du pouvoir. Et surtout, il aborde les problèmes du pays avec pragmatisme et réflexion.

Quel plaisir de l’entendre parler d’économie avec la métaphore de la cordée d’alpiniste !… Dire que nous sommes tous liés pour arriver au sommet, le chef d’entreprise comme premier de cordée pour tailler le chemin, mais aussi l’ouvrier, le retraité et tous les autres comme membres à part entière de l’expédition. Si l’un chute, toute la cordée chute. Et sans chef de cordée, Continuer la lecture de Je suis un (nouveau) macroniste !…

Une fête très déjantée…

« Le sens de la Fête » : grand retour du tandem Toledano-Nakache, auteurs de comédies exceptionnelles ( « Intouchable » ), réussies ( « Nos Jours heureux » ) ou complètement ratées ( « Tellement proches » ). La patte artistique de ces deux auteurs est de jouer les équilibristes sur la crête de scénarios aux situations forcées, source de fous rires, tout en essayant de ne pas tomber dans l’excès et le grand n’importe quoi. Ils n’y arrivent pas toujours !… Je relisais sur Allo-Ciné ma critique de « Tellement proches » que j’ai noté en son temps 1,5 sur 5. Un film qui m’avait laissé froid par son délire, « comme si les poissons de votre aquarium s’étaient grimés et déguisés pour se mettre à danser au son du carnaval de Rio… ».

Avec « Le Sens de la Fête », nous voilà à nouveau dans une histoire qui flirte avec cette fragile frontière Continuer la lecture de Une fête très déjantée…

Oripeaux…

Ce joli mot est toujours au pluriel. Rare et élégant, ce mot désigne des vêtements usagés qui conservent un certain éclat. Des guenilles de riche, en somme, témoins fidèles d’un temps glorieux qui n’est plus…

Claude Nougaro dans sa chanson « Armstrong » l’utilise avec ironie. Les oripeaux sont dans sa bouche les moyens futiles des hommes de se hausser du col. Dans la chanson, au delà des oripeaux, blancs ou noirs de peau se retrouvent frères dans leurs os ivoires…

Les oripeaux sont aussi la marque d’une aristocratie ruinée à qui il ne reste de richesse que sa particule. Le mot est alors charmant par sa forte dose de nostalgie…

Un soleil qui n’est pas au zénith…

« Un beau soleil intérieur » : ce film vaut d’abord pour Juliette Binoche. Une actrice d’une sensibilité rare qui a une fâcheuse tendance à s’égarer dans des films d’auteurs très arides, peu ouverts au grand public. Quoi qu’amoureux du cinéma dans son universalité, je n’avais pas trouvé récemment de convergence entre son cinéma et le mien.

Quel plaisir donc de la retrouver ! Elle est lumineuse et sait passer du rire aux larmes avec un naturel confondant. « Un beau soleil intérieur » lui donne un bon rôle de composition, celui d’une femme seule, déboussolée, vivant mal sa solitude et désespérément en quête d’amour. Un rôle touchant qui traduit bien la détresse de nombreuses femmes célibataires ou divorcées, qui après un certain âge, peinent à trouver l’âme soeur. Ce combat au quotidien méritait bien un joli film…

Hélas, la réalisatrice Claire Denis traite le sujet Continuer la lecture de Un soleil qui n’est pas au zénith…

Peccamineux

Voilà un mot dont on comprend bien pourquoi il est tombé dans les oubliettes de notre usage. Il sent trop le souffre de la religion… Est peccamineux, tout ce qui concerne le pêché. « Une pensée péccamineuse » ne l’est plus, maintenant que toute référence religieuse est écartée. Cela devient « un rêve érotique ». Plus parlant et moins mystérieux…

Moi je l’aime bien ce « péccamineux ». Il est le vestige d’une époque où les hommes craignaient Dieu.

Le délicieux jardin des Hansen…

Le Musée Jacquemart-André fait fort, une nouvelle fois !!!…  Son exposition temporaire de la collection particulière de Wilhelm Hansen est somptueuse. Cet esthète ( 1868-1936 ), riche assureur danois, constitua en l’espace de deux ans, durant la guerre, une collection d’Impressionnistes d’une richesse inouïe. Cet homme chanceux ambitionnait, en effet, d’avoir au moins une douzaine de toiles de chacun des plus grands peintres français de la fin du XIXème siècle. Objectif qu’il ne réussit pas à atteindre totalement, mais qui fit de sa collection particulière une des plus belles rassemblées par un seul homme.

Même s’il dût revendre une partie de ses toiles du fait d’un revers de fortune, Wilhelm Hansen confia tous ses trésors à un musée danois, le musée Ordrupgaard qui nous fait l’honneur de présenter à Paris une partie de sa riche collection. Ne loupez pas l’événement !…

Voilà quelques images de cette belle visite Continuer la lecture de Le délicieux jardin des Hansen…

Des soeurs gonflées aux anabolisants…

Vox populi, vox dei ? Pas sûr… Ainsi les 4 étoiles du vote internaute pour « Seven Sisters » ne me semblent pas totalement méritées. Car les films d’anticipation, pour inventifs et imaginatifs, qu’ils soient, doivent s’appuyer sur une logique implacable, une cohérence du monde inventé jusque dans les moindres détails…

Point de cela, ici. Le contexte est flou, comme s’il avait fallu créer trop rapidement un nouveau monde autour d’une idée folle : faire jouer à une personne 7 personnages différents qui s’assimilent à une seule personne… Hélas, Continuer la lecture de Des soeurs gonflées aux anabolisants…

Derechef

Voilà un mot encore tombé dans l’oubli, alors qu’il a le mérite d’être court pour exprimer une chose qu’on formule le plus souvent en deux mots : « une seconde fois » ou « à nouveau »… Il est curieux que notre monde n’ait pas préféré aller au plus court, comme il le fait habituellement.

Car comment plus joliment abréger une conversation que de dire devant un opportun. « Et je vous dirai derechef que vous avez tort et que vous êtes un fat ». Il préférera rompre le fer de peur d’avouer qu’il n’a rien compris.