Le tigre et le president

Film léger comme un voile de filigrane. Il s’imprègne heureusement dans votre conscient le temps de la projection pour être aussitôt oublié à la sortie. L’objectif est louable, sortir de l’anonymat un président de la république, Paul Deschanel, qui est rentré dans l’histoire uniquement pour une mésaventure rocambolesque, la chute d’un train. Un homme peut-il se résumer à si peu de choses ?

Certainement pas… Les pages Wikipedia sur Paul Deschanel sont d’ailleurs passablement longues. Il valait sans doute beaucoup mieux que ce que la postérité a retenu de lui. C’était assurément un homme de consensus, député moultes fois plébiscité dans sa région l’Eure et Loir, un politicien modéré dans une époque qui ne l’était pas, un homme aux grandes ambitions dans le domaine des idées, tout cela force déjà le respect. Cet inconnu qui réussit à battre à la régulière le candidat naturel à la présidence, auréolé de la victoire qu’était Georges Clémenceau, mérite assurément l’attention.

C’est ce à quoi s’attèle ce film avec un extraordinaire interprète en la personne de Jacques Gamblin. Il donne à son personnage un sourire lumineux, une élégance folle, une grande naïveté contrebalancée par le verbe d’un tribun, et surtout le regard d’un honnête homme aux idées en avance sur son temps. Gamblin nous le rend bien sympathique et touchant, ce doux dingue qui est en proie à une folle anxiété. Un homme dévoré de l’intérieur par le poids de sa fonction, et une volonté de bien faire qui l’anesthésie. Le film procure un bon moment, détaché du temps… Ce n’est déjà pas si mal.