Le temps des secrets

Le temps des secrets, tout le monde connaît ce formidable livre de Marcel Pagnol où il a consigné ses premiers émois amoureux avec la sensibilité unique qui était la sienne. Nous sommes tous tombés amoureux d’une Isabelle Cassignol au point d’en perdre le sommeil et la raison. Pagnol avait su si bien décrire la palpitation d’un coeur de douze ans devant une jeune beauté arrogante et sûre d’elle-même.

Christophe Barratier s’est attaqué au roman pour en faire un joli film bien léché, s’inscrivant dans les mêmes lieux que les films d’Yves Robert des années 90 ( la gloire de mon père et le château de ma mère ). On s’inscrit dans les pas de grands succès du box office, avec des acteurs presque mimétiques, comme pour faire une suite. Ce manque d’authenticité se ressent au début, où l’absence d’accent des personnages et leurs costumes flambants neufs donnent une apparence un peu scolaire au récit. Le film se laisse regarder, mais il y manque l’étincelle du génie d’Yves Robert.

Heureusement, les deux garçons excellent à redonner vie aux émotions pagnolesques dans la garrigue provençale. Et puis arrive Mélanie Doutey, au regard si doux et bienveillant, qu’elle incarne parfaitement la délicieuse Augustine. Petit à petit, le film prend ses distances avec ses modèles, et trouve sa propre voie. Les acteurs y contribuent allègrement, en particulier Guillaume de Tonquédec en père la rigueur et François Xavier Demaison dans le rôle tout en couleur de l’Oncle Jules. Le spectateur se laisse embarquer par la magie du récit, la beauté des paysages et la justesse de jeu des petits protagonistes.

Dans les dernières scènes, c’est même l’émotion qui s’invite, avec la larme à l’oeil, pour finir dans un générique rappelant le destin des différents personnages. Le réalisateur a réussi son pari : retrouver la pureté d’un récit exceptionnel qui est déjà écrit dans notre inconscient collectif, comme beaucoup de chefs d’oeuvre de l’écrivain-cinéaste. Le film manque d’audace, c’est certain, mais il est conforme à l’esprit intimiste de l’auteur. C’est déjà suffisant pour faire le déplacement…