Quel beau moment de cinéma !… Sans doute le film le plus subtil de ces dernières années, un film où le silence et les sous-entendus vous susurrent des mots aussi sûrement que de longs discours. La recherche du père est une expérience qui parle à tous. Qu’il soit proche avec souvent des zones d’ombre ou qu’on ne le connaisse pas, le père reste pour chacun une boussole, ou pour ainsi dire un marqueur de l’existence. Le réalisateur Philippe Lioret parle tout en finesse de cette relation au père avec l’histoire de Matthieu, jeune divorcé se découvrant par hasard une famille au Quebec. Le scénario nous embarque alors dans une prise de contact en pointillé où l’enfant naturel est sommé de respecter le premier cercle familial. Le malaise s’instaure petit à petit, lié au silence imposé au jeune Français. Il finit par se sentir étranger à sa famille. Avant de faire une découverte qui va le bouleverser…
« Le fils de Jean » est vraiment exceptionnel par son jeu d’acteur. La sensibilité du film vous taraude, et vous vous surprenez, plusieurs heures après, à méditer certaines scènes. Tout est dit avec les yeux, avec une pudeur des personnages qui touche au coeur. Tous comprennent sans rien dire, comme cette mère qui joue avec les rétroviseurs dans la voiture pour observer une ressemblance troublante. Et que dire de ce jeu de séduction manifeste entre Matthieu et Bettina qui se termine par une très chaste étreinte. Quand les pressentiments courent plus vite que les sentiments !
La force de ce film est de ne pas juger. C’est la vie tout simplement. Mais le personnage principal Matthieu quitte le Quebec avec la folle envie de s’occuper de son jeune fils. C’est la seule leçon de ce film qui se déguste à la petite cuillère à café. Comme une émulsion de crème fouettée…