Dans notre époque où le cinéma est un grand parc d’attraction où l’on vénère l’insouciance, pas facile de parler de la mort, et encore moins de la maladie. La dégradation du corps et de l’esprit est aux antipodes des valeurs contemporaines. Becker s’y était risqué avec « Deux jours à tuer », un film déjà poignant où Dupontel renversait la table, avant de se cacher loin du monde.
Les deux brillants auteurs du « Prénom », sans doute excités par le challenge, ont souhaité aborder le thème sous la forme d’une comédie. Avec l’idée astucieuse de départ d’une confusion dans les diagnostics pour arriver à un résultat bien trouvé : la maladie n’est plus un parcours désespérément solitaire, mais une aventure à deux où chacun s’oublie pour prendre soin de l’autre. C’est très subtil de troquer ainsi le misérabilisme pour l’empathie.
Quand on y ajoute le sens des dialogues bien léchés du tandem du « Prénom » ( Ah cette fameuse tirade de Valérie Benguigui ! ) et le jeu très nuancé d’un Luchini absolument parfait, aux côtés d’un Bruel bien dans son rôle, on parvient à un film doux et amer qui enchante. Un film plus léger que son sujet, en particulier dans sa réponse à la question « que faire de ses derniers mois de vie », une question où les réponses sont loin d’être consensuelles, comme on le voit chez ces deux hommes que tout oppose. C’est aussi pourquoi le film est si touchant. Il nous parle de notre propre angoisse face à la faucheuse, et à la nécessité de vivre pleinement, en n’oubliant pas de dire à nos proches qu’on les aime.
L’émotion est là, qui nous saisit, notamment dans les dernières images. Et la formidable actrice Zineb Triki joue un ange revenu de l’enfer pour apporter son sourire au partant et à celui qui reste… Un très joli film qui raconte la mort avec le sourire, soit une sacrée démystification de ce qui fait plus que jamais partie de la vie…