La vitesse ne m’a jamais fait vibrer. Elle me fait plutôt peur, et je ne ressens aucune montée d’adrénaline à appuyer lourdement sur la pédale de droite. Je fuis les courses automobiles que je considère comme une débauche inutile de carburant et d’énergie pour attribuer le premier prix à un pilote qui est nécessairement le plus fou du circuit.
Mais ce mépris de la vitesse ne m’exclut pas du monde de l’automobile. Les belles voitures, les carrosseries rutilantes, les chromes qui brillent, et tout ce qui fait d’une automobile l’expression du génie humain, tout cela me parle, me séduit, m’émoustille. L’automobile, comme aventure humaine, est un beau voyage. C’est ce à quoi nous convie le film Le Mans 66.
Un film long et dense qui ne parle pas uniquement d’une course, mais du combat de deux hommes pour y arriver. Carroll Shelby, le concepteur qui a une foi inébranlable en son projet, faire de Ford une marque qui triomphe aux 24 heures du Mans. Ken Miles, le coureur et metteur au point, sceptique par essence, mais animé par une passion et une détermination sans faille ( formidable Christian Bale qui réhabilite un homme d’exception tombé dans l’oubli ).
Le choc de culture entre les passionnés de course et l’industriel Henry Ford II est parfaitement rendu. Comme toujours, derrière les projets improbables, il y a toujours des questions d’égo. Ford contre Ferrari, la cause était entendue sur le papier. Mais une blessure d’orgueil peut faire des miracles…
Pendant près de deux heures et demi, on respire l’asphalte, les odeurs d’essence et le vrombissement des moteurs. C’est un challenge d’hommes qui dégage son lot de testostérone. Et d’émotions fortes comme Henry Ford lui-même l’expérimente dans un essai particulièrement gerbant. Heureusement, le personnage joué par la sublime Caitriona Balfe ( vedette d’Outlander ) apporte son lot d’apaisement féminin, avec une ou deux scènes où elle affecte un détachement de façade, tout en jetant sur ses hommes un regard d’une bienveillance infinie.
La course du Mans est très bien restituée dans son contexte historique. Le bitume défoncé de petites routes de campagne et le rapport poids/puissance insensé des bolides de l’époque, tout concourt à faire de ces coureurs des années 60 des monstres de courage. Beaucoup y ont laissé la vie, comme Miles lui-même quelques mois après sa course. Ce danger permanent et la mort qui rôde, auréolaient de gloire les vainqueurs, un peu comme les chevaliers d’antan après leurs joutes.
Aujourd’hui, la technologie a pris le pas sur le talent des hommes, et la course est sans doute moins captivante. Mais la passion pour les moteurs qui montent dans les tours, n’est pas prête de s’éteindre. Et même si ce n’est pas ma tasse de thé, je trouve que c’est très bien comme cela.
Le Mans 66 est à voir par tous les amateurs de belles voitures, mais aussi par les femmes pour comprendre un des moteurs de la gente masculine. Il n’y a aucun risque : les uns comme les autres y trouveront du plaisir…