J’ai toujours aimé les films de procès d’assises. Il s’en dégage toujours de fortes tensions liées au choc de la partie civile et de la défense. Nulle part ailleurs que dans ces films, on ressent le caractère très humain, par conséquent fragile et aléatoire, de la justice. Son fléau penche alternativement à droite ou à gauche sous l’effet du pouvoir de conviction du procureur ou de l’avocat de la défense. L’éloquence au service d’une cause…
Dans « une intime conviction », on connaît déjà le verdict. C’est l’affaire Viguier qui a défrayé la chronique. Comment aborder une histoire vraie, sans prendre parti, sans céder au voyeurisme collectif ? Le réalisateur Antoine Raimbault a choisi de garder tous les protagonistes de l’affaire ( avec leur patronyme ), en introduisant juste un personnage fictif, joué merveilleusement bien par Marina Foïs, pour amener subtilement l’histoire au spectateur. Un « Monsieur Loyal » de l’affaire en somme, avec ceci de particulier qu’elle soutient à 100% l’accusé.
Bel exercice de style, et belle réalisation avec cette utilisation judicieuse de bandes sonores qui permettent de plonger le spectateur dans le coeur de l’action. Le film se laisse voir sans déplaisir… Ce qui gêne tout de même, est la présentation tronquée du procès, et la tentation mollement combattue de trouver un coupable de substitution. Surtout, les débats du procès paraissent presque accessoires. L’intrigue s’en désintéresse, préférant se concentrer sur le personnage fictif autour duquel il est plus facile de broder. La vie de famille du personnage de Marine Foïs accapare l’image, pour ne pas rentrer dans le détail du procès.
Et puis bientôt survient le moment de gloire, le plaidoyer impeccable et valeureux de Eric Dupont-Moretti en avocat de la défense. Un point culminant, superbement magnifié par le talent d’Olivier Gourmet. On comprend alors que tout le film n’avait pour but que de mettre en valeur le joyau de cette défense, et donner une leçon de justice au spectateur…
Fort bien. Dupont-Moretti est un très grand avocat, et nous avons beaucoup de choses à apprendre de sa conception sans concession de la justice. Mais j’ai ressenti un léger trouble, car cette leçon se fait aux dépens d’un homme, en l’occurrence l’amant de la victime qui, après ce film, ne sort pas grandi, pour ne pas dire plus. On arrive là à un point d’équilibre dangereux de ces histoires trop réelles. A tout faire, je préfère les histoires inventées, totalement ancrées dans le réel. Sydney Lumet avec « The Verdict » nous enseignait également la justice, mais il le faisait tout en nuances, et cela avait plus de poids….