« Seul dans Berlin », seul contre le mal

Son réalisateur est un play boy suisse. Sa principale actrice est une anglaise shakespearienne. Son histoire est celle de deux courageux Allemands. Et le film se revendique franco-germano-britannique. Joli cocktail européen !… Il n’est pas gage de succès, pour autant, car le film n’aura pas tenu longtemps à l’affiche. D’ailleurs, je l’ai vu dans une petite salle de la rue Mouffetard, un cinéma à l’ancienne qui semble ne pas avoir changé depuis les années 50.

« Seul dans Berlin » est une histoire comme je les aime. Un drame solidement enraciné dans son époque, en l’occurence l’Allemagne des années de guerre, dans un pays totalement possédé par la pieuvre nazie. L’histoire d’un couple qui a perdu son fils dans la campagne de France, et qui, du coup, ouvre les yeux sur le régime nazi. Comment se révolter seul(s) contre un régime totalitaire dans un pays en guerre ? La chose est impossible. C’est pourtant ce que va faire ce couple, en dispersant au petit bonheur dans la ville de Berlin des cartes postales avec des messages anti-guerre appelant au renversement d’Hitler. Une lutte symbolique contre le mal, avec pour seule arme un dérisoire couteau de porte-clefs. L’expression d’un courage aussi fou qu’inutile.

Le film réussit avec une belle économie de moyens à créer une atmosphère pesante qui enrobe les deux résistants d’une sourde menace. La gestapo tisse sa toile, en bénéficiant de l’aide d’une population embrigadée qui rapporte la plupart des cartes aux autorités. Un horizon totalement noir, à peine nuancé par quelques voisins qui ont conservé un morceau d’humanité.

« Seul dans Berlin » parle de la lutte contre le totalitarisme. De la dignité de l’homme. De l’individu perdu dans une société dégénérée. C’est beau, simple et limpide. La force intérieure de cet homme et de cette femme est très bien restituée.

C’est donc un très joli film, certes un peu académique et un peu linéaire. Mais avec une belle interprétation très intense des deux protagonistes. Quel regret cependant que ce film ne soit pas en allemand, car la langue anglaise dans une Allemagne nazie fait un peu verrue.

On gardera un souvenir ému pour les deux résistants allemands qui ont inspiré cette histoire, reprise à partir d’un livre écrit juste après la guerre : Otto et Elise Hampel qui ont montré une autre image des Allemands au prix de leurs propres vies. Ils ont été guillotinés un jour d’avril 1943… Deux visages ordinaires de héros magnifiques.

 

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