« Nocturnal Animals » : dérangeant…

« Nocturnal Animals » est un drôle d’animal. Ce film vous prend à la gorge dès la bande annonce ( assurément la palme de l’originalité ! ) et vous plonge dans une atmosphère particulière à la David Lynch, ce qui est un compliment. L’Ouest aride du Texas avec des personnages un peu déjantés. A la caméra, Tom Ford, le beau gosse de la mode, ex-patron du design de Gucci, qui a développé sa propre marque éponyme. C’est son deuxième film, et il faut bien lui reconnaître un certain talent dans ce second métier. Chaque scène semble très travaillée au niveau de l’image. La touche toute en sensibilité du maître. Mais c’est dans un style minimaliste, avec la caméra proche des personnages, comme pour capter leur essence.

A l’appui de cette belle technique, un casting quasi parfait, avec deux acteurs d’une grande densité, Amy Adams, belle rouquine froide joliment déstabilisée, et Jake Gyllenhaal, homme doux dont on dénonce plusieurs fois la faiblesse. C’est la tare suprême dans une société américaine portée par la performance et la violence. Cette femme malheureuse dans son couple, reçoit le manuscrit de son premier mari. Elle en entreprend la lecture, surprise et très vite troublée de voir qu’elle est un personnage du livre, à côté de son ex-compagnon qui ne se donne pas le bon rôle.

Le film montre alors les images de la fiction, avec des retours fréquents dans la réalité ou dans le passé. Le roman est un fait tragique qui prend le spectateur aux tripes par des images d’une grande tension. Un fait divers qui dérape. Un homme faible qui ne sait pas défendre sa famille, notamment sa fille romancée et sa fille réelle… Une histoire qui vise à faire passer un message à l’ancienne épouse, un message qu’elle va prendre de face, comme un uppercut. Elle en sort groggy.

Reconnaissons-le, le spectateur a aussi son compte dans ces images sèches qui dévastent tout. Les dernières images du film donnent la justification ultime à ce travail d’écriture. Il en ressort que l’écrivain faible est le maître du jeu. Celui qui maîtrise un art, est un être fort, nous dit le grand couturier en épilogue de son histoire. Si ce message d’une solidarité entre « artistes » est peut-être un peu simpliste, l’exercice stylistique de « Nocturnal Animals » n’en est pas moins brillant.. Un bon film qui réussit à surprendre.