Mémoire de nos pères…

Cela faisait longtemps… Longtemps que j’avais envie d’aller voir. Non pas par voyeurisme ou par une curiosité malsaine. Mais pour perpétuer la mémoire d’un drame… Seulement ce lieu se mérite. Il est à l’écart des grandes routes dans ce Limousin rural que vous ne pensez pas naturellement à visiter. Il est pourtant à voir une fois dans une vie d’homme. Comme une obligation morale vis à vis des anciens et de notre histoire commune.

Oradour sur Glane est ce village martyr figé dans ce jour de juin 1944 qui aura vu 652 personnes – hommes, femmes, enfants – mourir dans des conditions atroces. Brûlés dans leur village qu’ils n’avaient pour la plupart jamais quittés. Des victimes comme il y en eut  hélas beaucoup pendant la seconde guerre mondiale. Mais Oradour est en France, dans ce pays béni des Dieux où le massacre de masse n’avait plus cours depuis longtemps. Dans aucun autre lieu, nous n’avons connu l’horreur à un tel niveau d’intensité.

Le choc a été tel pour les survivants que plus rien n’a bougé depuis ce jour où une division SS a rassemblé toute la population d’un village dans son église, avant d’y mettre le feu. Tout est resté dans son jus, et nous pouvons voir aujourd’hui avec la même détresse l’étendue des dégâts. Les murs calcinés, les ruines des habitations, les tôles de fer tordues par le feu, les carcasses de véhicules rouillés qui n’ont pas bougé depuis le 10 juin 1944… Oradour est un village fantôme où règnent encore les âmes de centaines de sacrifiés. L’église, lieu de paix et de communion avec Dieu, est totalement éventrée sur un ciel qui n’a pas hélas été d’un grand secours pour les pauvres villageois.

Les photos rassemblées de presque toutes les victimes personnifient le drame, et nous regardons dans les yeux ces pauvres hères dont le seul tort est de ne pas avoir été là au bon moment. Toutes ces vies perdues, tous ces destins foudroyés, tous ces rêves anéantis avant même d’avoir été formulés.

Le visiteur se promène en silence dans les ruines, attentif à tous ces petits indices qui traduisent une vie paisible, au fin fond de la campagne, très loin de la guerre. Mais le mal n’est jamais très loin… Il a pris forme ce jour-là d’une estafette en side-car sous un uniforme nazi. La fin de l’innocence pour beaucoup d’enfants qui jouaient là…

Oradour est un des plus grands lieux de mémoire. Il est à voir au moins une fois dans une vie….