Loi Duplomb : la tentation de la facilité

Je suis en colère… Les Français sont une fois de plus adeptes des solutions faciles avec cette mobilisation générale contre la Loi Duplomb. Une approche angélique des problèmes qui ne cherche pas à analyser le problème froidement pour trouver une solution médiane. Non, l’idée est de tuer un produit suspect, quels que soient les effets délétères que cela peut avoir sur le plan économique. L’industrie et le progrès sont nécessairement les artisans d’un monde malfaisant qui ne vise qu’à sacrifier le bien-être de l’humanité au service d’intérêts particuliers. En d’autres termes, tous pourris, surtout dans la chimie. Tuons tous ces industriels et ces paysans dévoyés… Une nouvelle manifestation, s’il en était besoin, de la disparition du mot « nuance » au pays de la « révolution ».

Analysons la question calmement. Pourquoi des politiques prendraient-ils le risque de s’opposer à la vox populi, en réintroduisant en France un produit qui reste accepté par l’ensemble des 26 pays d’Europe ? Sont-ils fous, voire suicidaires au pays des coupeurs de têtes ? Ou ont-ils simplement pondéré ces risques politiques au regard de l’intérêt pour la nation, et notamment notre agriculture très handicapée dans la lutte qu’elle mène contre ses concurrents étrangers. ?

Ces politiques ont du courage. Ce ne sont pas des jouets entre les mains de lobbies. Des hommes et femmes qui veulent rétablir un certain équilibre pour que la France reste dans la course.

Avez-vous remarqué dans les supermarchés ou même dans les marchés de nos villages l’origine des légumes et des fruits qui nous sont vendus ? Ce sont maintenant essentiellement des produits étrangers. Des tomates espagnoles, des abricots italiens, des cerises belges, des pêches portugaises, du jambon allemand ou espagnol… Tout est à l’avenant. Notre agriculture, autrefois la force de la France, est à la dérive, ce qui est stupéfiant dans un pays au climat tempéré qui ne souffre pas trop de déficits hydriques. Alors pourquoi cette perte de compétitivité ? Posons-nous cette bonne question avant de jeter l’anathème à nouveau sur nos paysans…

C’est souvent la conséquence de nos réglementations stupides qui alourdissent le compte d’exploitation de nos agriculteurs. Des coûts qu’ils ne peuvent répercuter, sous la pression des centrales d’achat des grands distributeurs. C’est une lente glissade pour tous ceux qui ont la lourde mission de nous nourrir, et qui finissent pour beaucoup à attenter à leurs jours. Ou simplement à tout abandonner rendant leurs terres à la friche.

Face à cela, nous pourrions être solidaires, en acceptant de payer plus chers nos fruits et légumes, voire notre charcuterie, qui bénéficient d’une haute protection environnementale et gustative. Que nenni !… En dehors de la louable initiative de la marque « C’est qui le patron » qui a trouvé quelques soutiens ( votre serviteur en premier lieu ), les Français continuent à faire leurs emplettes « au prix le plus bas », soit essentiellement avec des produits venant au-delà de nos frontières.

Dans ce contexte, il faudrait réfléchir à deux fois avant de fixer de nouveaux poids aux pieds des forces vives de notre pays. Déjà en 2001, nous avons pris des décisions funestes avec les 35 h. Une superbe avancée sociale, tellement bonne qu’elle n’a été suivie par aucun autre pays d’Europe. Bilan : après 25 ans, notre industrie est au tapis. Le nombre de voitures produites en France est passé de 4 millions en 2021 à 1,8 millions en 25 ans. Regardez la marque de la voiture dans votre garage, elle a peu de chance d’être française, et si elle l’est, cette voiture a été fabriquée, une fois sur deux, à l’étranger… C’est une casse sociale terrible dont nous subissons les conséquences chaque jour avec un mal-être croissant de notre population. Voulons-nous la même chose pour notre agriculture ?

Etre adepte de la Loi Duplomb, ce n’est pas donner un blanc-seing aux neonicotinoïdes en général. C’est juste considérer que ce produit, jugé comme « safe » par l’agence sanitaire européenne et utilisé sans états d’âmes par tous nos voisins, est un moindre mal, avant de lui trouver un substitut. Une démarche raisonnable. Plus en tout cas que de l’interdire, de pénaliser nos agriculteurs et d’importer massivement des produits étrangers qui auront été produits avec son aide.

Défendre des intérêts économiques, c’est aussi défendre la collectivité. Arrêtons de penser que conduire nos paysans à la faillite n’aura pas de conséquences sociales et humanitaires à la même hauteur que tous les scénarios catastrophes que nous brodent nos écolos, une fois de plus, très anxiogènes.

Pour ma part, j’en ai marre de ces Français arrogants qui estiment en savoir toujours davantage sur toutes ces questions sociétales que nos voisins. La France n’est plus le phare de l’occident, ne vous en déplaise. C’est un pays malade qui fait rire ses voisins ou inspire leur pitié, à l’image des Suisses très ironiques sur notre société en crise.

Nous allons tout droit vers le dépôt de bilan. Je vous jure que ce jour-là, la question des neonicotinoïdes vous paraîtra quantité négligeable. Mais ce sera alors trop tard… Essayons d’éviter la chose et de sauver ce qui peut l’être…