Il s’appelait Harmenszoon van Rijn. Heureusement pour nous, il est rentré dans la postérité par son seul prénom : Rembrandt.
Assurément, le plus célèbre des Hollandais qui fait l’objet d’un véritable culte chez nos amis bataves. C’est aussi un de mes peintres préférés car le « clair obscur » dont il est le maître, trahit à mes yeux le mieux le talent d’un artiste. Maîtriser les jeux d’ombres et de lumière est en peinture, comme en littérature ou dans le cinéma, la clef pour passer du statut de belle oeuvre à celui de chef d’oeuvre.
Le Musée Jacquemard-André a eu la bonne idée de faire une exposition « Rembrandt intime ». Il a fait venir des tableaux du monde entier. Certes, c’était impensable de faire venir à Paris la fameuse « Ronde de nuit » ou la non moins célèbre « leçon d’anatomie ». Mais comme le musée parisien a lui-même dans sa propre collection trois tableaux du maître ( fructueux objets de prêts futurs ), l’exposition a réussi à faire une jolie rétrospective de l’artiste. Courez-y vite, il y a là des tableaux qu’on n’a pas souvent l’occasion de voir.
Comme « la Parabole de l’Homme riche » ( cf. ci-dessus ), un tableau de 1627, alors que l’artiste avait à peine 21 ans. Le jeu de lumière autour d’une bougie qu’on ne voit pas est une merveille. On reste sans voix devant la chaude intimité de la scène.
Rembrandt est un artiste qui, comme d’autres grands peintres, aura tout connu : la précocité, la gloire, la richesse, la faillite personnelle, les drames familiaux et une maturité un peu austère. Avec une caractéristique plus rare, à savoir une envie un peu mégalomaniaque de se mettre en scène. Rembrandt a ainsi peint une quarantaine d’auto-portraits qui permettent de le voir à tous les âges. Il joue aussi à se représenter comme personnage secondaire de ses tableaux, comme dans « la scène d’histoire » de 1626. Un peu comme Hitchcock qui, quelques siècles plus tard, interviendra comme figurant de chacun de ses films. Il faut croire que laisser une trace dans l’histoire de l’humanité est un puissant moteur de la création humaine.
J’ai découvert aussi dans cette exposition la personnalité de l’artiste : un esprit libre, peu adepte des compromis et de l’esprit de cours. Sollicité pour faire des portraits de grands personnages, il les peint avec une totale fidélité, c’est à dire pas forcément sous leur meilleur jour. C’est l’indépendance des grands…
Un dernier pour la route… La « Fuite en Egypte », scène montrant Joseph et Marie avec l’enfant Jésus est un thème qui a inspiré les plus grands peintres : Caravage, Giotto, Poussin… Rembrandt l’aborde à son tour dans un style épuré et intimiste comme jamais. Son âne est sans doute le plus beau de la création. Et la Sainte Famille fait une apparition fugace dans un décor d’ombre. Oui c’est assurément un des plus grands…