Merveilleux reportage de France 3 hier sur Claude François. A voir et revoir en replay… Un très bel hommage, sensible, émouvant et très honnête. Le chanteur des années 60 et 70, mal-aimé de son époque et pourtant un des plus grands vendeurs de disques de la chanson française, a merveilleusement bien traversé le temps. Aujourd’hui, dans une soirée dansante, il n’y a pas de baisse de rythme qui ne soit immédiatement rattrapée et électrisée par un tube de Claude. Notamment son dernier « Alexandrie Alexandra » au rythme endiablé. Un tube déjà disco qui laisse mesurer à quel point il aurait pu encore marquer de son rythme et de ses mélodies les années 80, si le destin n’en avait pas décidé autrement.
Il est mort un jour de mars 1978. Un jour dont je me souviens parfaitement. Il est avec Joe Dassin, le chanteur dont la disparition m’a le plus touché dans mes jeunes années. Né en 1962, l’année de sa première scène, j’ai grandi avec Claude François. Il fait partie de mon enfance, comme aucun autre…
Ce type était un ovni… Un créateur de mélodies qui vous trottent dans la tête pour ne plus vous lâcher. Combien de fois ai-je pris le chemin de l’école en fredonnant « le lundi au soleil » ? Ces affreux lundi toujours ensoleillés, alors qu’il fallait s’enfermer à l’école… Et comment oublier l’entrain communicatif du « Y a le printemps qui chante » qui vous donnait la pêche pour célébrer les beaux jours ?
J’étais un mouflet, mais je ressentais déjà parfaitement le je ne sais quoi de nostalgie et de sensibilité exacerbée qui entourait chacun de ses tubes. Claude François qui, contrairement à beaucoup, n’avait pas pris de nom de scène, gardant son nom de baptême pour sa carrière, était un chanteur d’une sincérité absolue. Le coeur totalement ouvert au grand vent… Le film montre bien d’ailleurs à quel point toutes ses chansons ont été inspirées par sa propre vie. Il racontait sa vie, ses angoisses, ses émotions, ses déceptions par des chansons à la mélodie entraînante ou triste.
Ma condition de fan était pourtant difficile à assumer, car l’homme était détesté, très isolé dans le monde du show business. Le film révèle d’ailleurs que ce rejet de l’intelligentsia a commencé dès le début de sa carrière, Claude refusant d’entrer dans le moule… Je me souviens à un moment de lui avoir fait faux bond pour ne pas passer pour un ringard. Rimbaud avait raison, on est bête quand on a 17 ans…
Et puis je dois aussi à Cloclo d’avoir éveillé ma libido naissante avec ses clodettes, de plus en plus déshabillées au cours des années. Et dans les années 70, c’était encore rare de voir des filles dénudées à la télé… Les paillettes et les jambes des filles, c’était un cocktail merveilleux pour les yeux d’un garçon de 12-13 ans.
Ce film raconte son ascension avec beaucoup de justesse. Une grande honnêteté aussi car il ne fait pas l’impasse sur les mauvais côtés du personnage. Un perfectionniste tellement acharné qu’il en était odieux avec tout son entourage. On réalise à quel point il a été façonné par son enfance, par un désir de revanche, par une volonté de briller aux yeux de son père qui ne croyait pas en lui. Quelques scènes du film sont saisissantes, notamment quand il chante « Marche tout droit » au milieu de mannequins de cire représentant des jolies filles. Sur le plan sentimental, on peut dire qu’il n’a pas vraiment marché droit…
J’ai adoré ce film car il réhabilite un chanteur qui n’était pas uniquement « pour midinettes ». Contrairement à tous les chanteurs de l’époque, il n’avait pas les rockeurs américains pour modèles, quoi qu’il ait repris beaucoup de tubes des années 60, des Bee Gees aux Beatles. Son modèle était plus classique : Franck Sinatra, un crooner à la voix chaude qui le faisait rêver, alors qu’il commençait lui-même à chanter. Par une incroyable pirouette du destin, à peine dix ans plus tard, il offrait à Sinatra la chanson qui a ancré le crooner américain parmi les mythes : « My Way », version reprise par les Ricains de « Comme d’habitude »… CloClo superstar !