Extrait du livre d’Olivier de Kersauson « De l’urgent, du presque rien et du rien du tout » . C’est un ABCDaire synthétisant toutes les pensées du navigateur. Un homme libre, fin, subtil, d’une sincérité confondante qui en fait un vers luisant dans la masse grouillante de notre humanité.
Son article « Catholique » m’a parlé… Comme une évidence, un éclair de lucidité… Comme s’il prêtait des mots à mon propre sentiment d’appartenance. Merci à l’amiral ( son surnom aux Grosses Têtes ) pour ce texte limpide que j’ai réduit pour les besoins de l’exercice, mais que je vous invite à trouver in extenso dans son très beau livre.
« Morale, vertu… Ces notions ne me sont pas étrangères, loin s’en faut. Je suis un bon catholique. C’est la religion des gens qui m’ont mis au monde et que j’ai aimés. Alors j’ai du mal à la passer par la fenêtre. Quand je vais sur la tombe de mon père, de ma mère, de mon frère ou de ma première femme, c’est une croix qu’il y a. C’est ce monde-là. Je les ai vus être enterrés dans leur religion qui est aussi la mienne car nous avons partagé trop de choses pour que je puisse être indifférent.
Culturellement et biologiquement, j’ai un héritage catholique monstrueux. Je suis né dans une famille bretonne catholique depuis que le catholicisme existe. A tort ou à raison, pour moi, la transmission du monde s’est faite sous un éclairage catholique.
Ma culture religieuse ne dépasse pas la religion qui me fut enseignée. Ce qui m’en reste me convient assez. L’existence de Dieu telle qu’elle est enseignée chez les catholiques me plaît : j’aime avoir quelqu’un à remercier lorsque tout va bien, je trouve que c’est cohérent.
Il me plaît, intellectuellement, d’avoir au-dessus de ce monde, aussi imparfait soit-il, une sorte de grand architecte avec lequel j’ai des rapports distants mais à qui j’ai souvent de dire merci pour la magie de la vie.
En revanche, je n’ai rien d’un apôtre, je n’irais pas faire de prosélytisme, mes certitudes ne sont pas suffisamment ancrées. Ni un apôtre, ni un évangéliste. Ni l’un, ni l’autre. Mais j’ai suffisamment de certitudes pour ne pas être un renégat et encore moins un apostat.
Quand j’entends le coq chanter en Polynésie le matin, j’entends presque malgré moi la parole du Christ : « Avant que le coq chante, tu me renieras trois fois ». Je suis plein de cette culture, des saints arrivés en Bretagne dans des bateaux de pierre. J’ai vécu dans cette religion et je n’ai pas trouvé de raisons de la chasser.
Mes valeurs m’aident, d’autant que je suis armé comme un nuisible, j’avais jadis une vraie force physique. J’ai des réserves de méchanceté quasi inépuisables. Etant très observateur, je pourrais être odieux. Mais, par religion si l’on veut, j’évite de l’être. Parfois je suis débordé.
Je prie plusieurs fois par jour. J’adore le rite, c’est un concentrateur d’énergie. »