Quel plaisir de lire ce deuxième opus des Mémoires de la grande Catherine, après le premier qui m’avait beaucoup excité !… J’y avais retrouvé les combats politiques de ma jeunesse et la violence des joutes de l’époque. Ce second livre est plus contemporain. Il parle de politiques qui nous sont plus proches, Chirac, Jospin, Sarkozy, Seguin, Hollande, Macron… Récit incroyable ! Alors que la politique a tendance à ennuyer les Français, Catherine Nay nous raconte la chose comme un roman. Des détails invraisemblables, des anecdotes, des passions humaines qui donnent à l’intrigue des ressorts quasi balzaciens, tout s’enchaîne aisément sous la plume très honnête d’une journaliste certes engagée, mais pas militante. Surtout, c’est la femme la mieux informée du monde politique ( une vraie mine d’or ) et on comprend beaucoup de choses au prisme de ses confidences.
Le portrait de Philippe Seguin m’a touché. Celui de Dominique de Villepin m’a fait hurler de colère. Les couleuvres qu’a dû avaler Danielle Mitterrand m’ont fait frissonner de pitié. La découverte de quelques hommes de l’ombre, notamment Jacques Pilhan et Paul Guilbert m’a fait vibrer. Mais ce qui m’a le plus passionné, c’est le récit du destin de Lionel Jospin, « l’homme des 35 heures » qui a hélas engagé le pays dans une voie funeste. Incroyable de voir que cette loi est arrivée de manière presque impromptue, sans réelle préparation ni mesure des effets. En somme, une gestion du pays faite au jugé sur des seuls critères politiques.
La partie la plus people est dans le récit des mésaventures matrimoniales de Sarkozy avec sa Cecilia. On découvre que les fautes politiques du nouveau Président en début de son mandat ont tenu davantage à sa volonté de se concilier les bonnes grâces d’une femme qui s’éloignait de lui. le récit nous donne l’image touchante d’un homme amoureux ayant perdu tout sens commun parce que sa moitié prenait le large. Dans ce chapitre, comme dans les autres, le caractère profondément humain de l’action politique se révèle au grand jour, alimenté par les petits ressorts des uns et des autres que Catherine nous donne à méditer. Passionnant !
Au final, l’histoire se boit comme du petit lait. Mais du lait caillé, amer au goût, car la victime finale de ce maelström politique semble être la France, pays qui n’a jamais été orienté dans la bonne voie. Des concours de circonstances fâcheux ont toujours nuit à l’efficacité de l’action publique : la ré-élection de Mitterrand, l’élection du grand impuissant qu’était Chirac, la stupide dissolution, l’arrivée au pouvoir de l’idéologue Jospin, le divorce de Sarkozy, la crise financière de Lehman Brothers, l’élection de celui qui n’avait rien à dire, ni à faire, François Hollande… Un livre instructif qui est le parfait recueil de nos occasions perdues….
Petit détour final sur la vie de l’auteur. Elle se dévoile un peu plus dans ce livre, avec un hommage appuyé à son défunt mari, Albin Chalandon. Ces pages sont très touchantes. Finalement, la « grande bourgeoise » un peu hautaine se révèle être une femme de coeur. C’est aussi une des surprises du livre….