En amour, la guerre ne fait pas de quartiers… Telle pourrait être la conclusion des « Apparences », film dont le nom dévoile déjà un peu le jeu d’ombres et de lumières auquel on va assister. Un récit dans une ville étrangère peu connue, une caméra qui se donne des airs hitchcockiens dès le début avec une Karin Viard qui monte des marches en proie à une indéfinissable tension, des petits détails troublants qui émaillent la montée du doute…
Nous sommes au coeur d’un adultère comme il en existe beaucoup. Mais celui-là ne peut bien se terminer car il s’oppose trop à l’image de bonheur sur papier glacé que donne ce couple pour la galerie des mélomanes de la musique classique ( lui est chef d’orchestre ) et de la petite communauté cancanière des expatriés français dans la ville de Vienne.
Cette façon de lever les paravents pour divulguer les secrets de la vie bourgeoise n’est pas très originale, mais Marc Fitoussi, le réalisateur, le fait bien, bien secondé il est vrai par l’abattage d’une Karine Viard toujours aussi puissante dans son jeu et par un étonnant Benjamin Biolay, marmoréen à souhait, qui ne laisse rien paraître du sien. L’arrivée d’un jeune autrichien ( superbe Lukas Englander ), chien fou dans un jeu de quilles bien codé, va précipiter le drame. Le spectacle se laisse voir avec plaisir, voire un peu de sadisme, tant la vengeance de la femme trompée va se révéler explosive. Quand il s’agit de préserver les apparences, tous les coups sont permis. Les dégâts collatéraux ne comptent point… Karine est machiavélique. Mais certaines scènes font ressortir aussi sa souffrance de femme bafouée qui prend dans la figure le mensonge et la tromperie. La dernière scène réussit à surprendre un canevas pourtant bien balisé.
Au final, un film assurément de qualité qui restitue bien les tensions au sein d’un couple qui s’ennuie et ne trouve plus de satisfaction dans le partage. Le contexte de Vienne est sympathique, mais aurait mérité un développement plus profond et moins caricatural. Mais le petit milieu très fermé des expatriés est bien rendu, et constitue, à n’en pas douter, un activateur du feu qui couve. Un milieu aux amitiés artificielles en plus… D’ailleurs, il est symptomatique que ce soit la seule vieille bibliothécaire horripilante qui ne tourne pas le dos à la nouvelle paria. La richesse du coeur n’est jamais là où on le croit…