Ce qui est bien, l’âge venant, c’est que les verrous sautent et que les réalisateurs laissent plus facilement libre cours à leurs fantaisies. Daniel Auteuil en est une belle illustration avec ce film. Il sort de sa vénération pour l’oeuvre de Marcel Pagnol ( 4 films au compteur quand même ! ), et s’attaque à un sujet qui lui parle : les émotions suscitées par l’éclat de la beauté féminine auprès d’hommes très matures dont on pourrait penser qu’ils sont définitivement rangés des voitures.
Un sujet qui touche car il est courant de ne pas vouloir avoir l’âge de ses artères. Et pour quelques spécimens de la gente masculine, rêver même d’avoir la moitié de son âge… « Amoureux de ma femme » est un film très impliqué sur les fantasmes masculins qui polluent souvent la vie sociale de vieux messieurs ( et des moins vieux aussi, reconnaissons-le ) face à une ( jeune ) femme à la sensualité explosive. Adriana Ugarte, jeune actrice d’origine espagnole, est une grenade dégoupillée qui désoriente le pauvre Daniel Auteuil au point de lui susciter des envies d’autre vie. Et tout en essayant de donner le change, il est soumis à une boite à fantasmes qui fonctionne à plein tube. On rit de cette situation, d’autant que le récit est subtil, avec un savant mélange de réel et de rêve. L’alchimie du cerveau masculin est parfaitement rendue.
Alors le film peut agacer ou séduire, selon le degré d’identification du spectateur aux personnages : Auteuil, touchant dans sa désorganisation intime; Depardieu, étonnant de sobriété, Kimberlain impériale en guerre larvée contre l’envahisseuse. Et enfin la tentatrice Adriana, sublime, étincelante, véritable luciole brillant dans la nuit de la routine affective des deux compères. La belle espagnole est entourée d’un nuage de phéromones irrésistibles. Elle sulfate à tout va autour d’elle…
Ce film m’a séduit car il évoque avec tendresse la faiblesse des hommes, et les conséquences souvent tragiques pour leur équilibre psychologique, quand la dure réalité se rappelle à eux. Daniel Auteuil, dans le film, s’en sort avec une jolie pirouette rassurante. Mais Depardieu reste lui sur le bord de la route, abandonné et déprimé. Les hommes sont « volages et inconstants », on le savait depuis Marivaux. Il n’est cependant pas interdit de ressentir un peu de sympathie pour ces drôles de zèbres dévorés par leurs hormones.