Quelle tristesse !… Je l’adorais. Guy Marchand était un homme protéiforme, un acteur de télévision, de cinéma, mais aussi un crooner à la voix veloutée qui vous emportait sur ses territoires de prédilection, le jazz, le tango, la guimauve de concours pour des soirées à l’ancienne. Il avait une étincelle dans le regard qui en faisait un séducteur redoutable. Il était notre Julio Iglesias à nous. En plus léger, plus rigolard, avec le détachement de celui qui ne se prend pas trop au sérieux. D’ailleurs, comment prendre au sérieux, l’auteur du « Destinee » qui était la bande annonce des « Sous-Doués en vacances »…
A côté de cela, il savait rendre hommage aux maîtres du temps passé, ces jazz-men qui avaient tracé la voie qu’il essayait d’emprunter avec modestie. C’est aussi l’interprète savoureux du « Moi je suis Tango » qui restera à jamais sa signature, celle d’un homme touche-à-tout qui se retrouvait aussi bien dans les mélodies sud-américaines que dans les grands refrains de Paname.
Au cinéma, il était celui qu’on adorait voir jouer, avec sa désinvolture naturelle. Comment ne pas penser à « Coup de Torchon » où il est absolument génial en colon exubérant. Il a fait des grands films dans des petits rôles où il était absolument irremplaçable : « Mortelle randonnée », « Garde à vue », « Tendre Poulet », « L’Hotel de la plage »… Comment se passer de lui et de sa façon quasi unique de traverser la vie ? Et puis, il y a eu aussi les Nestor Burma qui ont été son bâton de maréchal. Une série qu’on aimerait davantage revoir sur les écrans…
Mais il était avant tout chanteur. On sent qu’il exultait dans les petites salles de jazz, seul devant un micro. Si vous ne le connaissiez guère, écoutez d’une traite « Moi je suis Tango », « Delirium », « le dernier bal des GI », « Mémoire d’un con » et « Mister Bing »… Vous partirez dans un nuage de nostalgie, avec une parfaite résurrection du passé et de ses bons moments.
L’hommage à Bing Crosby, un crooner américain qui était son modèle, a des paroles qui sonnent étrangement au jour de la disparition de Guy : « Dites, Monsieur Bing, Mister Crosby, vous qui êtes parti loin de la vie, au paradis des mélodies, dans les étoiles… Dites à Louis… Sans lui, le monde s’ennuie. Mister Crosby, dans les étoiles... »
Oui, sans lui aussi, le monde s’ennuie… Guy, tu nous manques déjà…