Musarder sur les routes de France, c’est à coup sûr découvrir des pans entiers de notre Histoire. Les remparts de la vieille cité de Provins qui datent du XIIIème siècle, en sont une jolie illustration. Ces remparts sont joliment conservés dans la partie Ouest de la ville ; ils continuent à ceindre la petite cité médiévale offrant une protection contre d’improbables invasions de brigands, de hors-la-loi ou de pillards. Ce qui est unique, est l’absence de toutes constructions au delà des remparts. Le regard se porte loin sur des champs cultivés, donnant au défenseur de la ville sur son promontoire une position toujours stratégique. Provins est resté dans son jus…
Mais il est possible de remonter davantage dans le temps. Nous l’avons fait, au hasard d’une messe dominicale de Pentecôte dans l’église de Saint Ayoul, en plein centre de la vieille ville. Cette église qui date du XIème siècle fut bâtie sur la sépulture d’un Saint, retrouvée en 996. Un homme d’église pieux qui était mort 322 ans plus tôt sur les Iles de Lerins au large de Cannes. Comment ses restes sont-ils parvenus à Provins près de trois siècles plus tard ? Cela reste un mystère…. Voilà quand même une histoire étonnante de célébration à double détente, une église vieille de 900 ans, pour célébrer un Saint mort en 675. Qui dira que la France n’est pas un vieux pays bien enraciné dans son Histoire ?
Mais le plus étonnant…
c’est que cette église ancrée dans le passé, est aussi étonnamment moderne. La célébration à laquelle nous avons assisté, est un merveilleux exemple de cette Foi chrétienne qu’on dit en perte de vitesse, et qui, dans certains lieux privilégiés, vit intensément, comme un coeur qui bat. Qui bat fort… Le curé de cette Paroisse est un grand gaillard à la voix de stentor. Fondamentalement humain, il a fait de son église un lieu un peu à part où les Chrétiens se retrouvent avec un plaisir intense. Son église était pleine d’une assistance de multiples origines, ce qui donnait à cette communauté paroissiale la diversité de la France d’aujourd’hui. Quelle impression suave de se retrouver tous réunis dans la même prière !… Les chants étaient joyeux, portés, partagés par toute l’assistance. Et l’échange du message de paix qui ne se faisait pas par poignées de mains – covid oblige – mais par inclination de la tête « à la japonaise », avait un petit quelque chose de magique. Nous étions un seul peuple, complice et fraternel…
Notre siècle, si peu fédérateur, avait ajouté un joli grain de sel, en apportant lors d’une grande rénovation de l’église en 2010, l’apport de nombreux vitraux sur les côtés, si bien que la cérémonie était baignée d’une lumière chaude. La couleur s’imposait à nouveau, et elle devenait un ciment de complicité au sein de cette communauté paroissiale, parfait reflet de la France qu’on aime.
C’est vraiment dommage que nos contemporains aient perdu l’habitude de rentrer dans les églises. Ce sont des lieux de paix, de légèreté, de concorde… Très loin des frictions et des tensions du dehors.
En tout cas, cette France profonde qui continue à croire à la construction d’un destin commun, m’a fait chaud au coeur. Rien ne vaut de telles escales dans les régions pour sentir le coeur d’un vieux pays qui bat. Un vrai coup de gonflette sur le plan spirituel et social….