Rochetaillée est le musée le plus délicieusement rétro pour les passionnés d’automobiles. Je n’y étais pas retourné depuis 1971, et je l’ai retrouvé dans son jus, conforme à mon souvenir. Presque rien n’avait changé. Les affiches sont totalement vintage, de même que le ticket d’accès bicolore qui n’a certainement pas changé depuis les années 60.
Depuis la mort en 2005 de son fondateur, Henri Malartre, le musée est passé dans le giron de la ville de Lyon. La ville entretient le mythe, mais ne fait aucun investissement de mise en valeur, ni d’élargissement des collections. Tout a l’air figé, ossifié. C’est au demeurant assez pratique pour l’ex-Lyonnais souhaitant y retrouver ses émotions d’enfant. Cette visite a donc été un retour dans les années 70.
Mais, au delà de mon cas personnel, pas étonnant que la fréquentation soit passée, en quelques années, de 150.000 visiteurs à 30.000. Rochetaillée est devenu un musée confidentiel. Je l’ai visité tout seul, sans rencontrer un seul visiteur, un dimanche ensoleillé de mai. Le gardien à qui j’exprimais mon étonnement, m’a dit que le soleil était là, et que les gens préféraient rester dehors, et divertir leurs enfants au Parc Walibi ( ? ). Nouvelle marque de désintérêt des Français pour l’industrie automobile ?
Qu’importe ! L’auto, grande ou petite fera toujours rêver… Et passer à côté de ce beau musée relève de la faute de goût… Voilà d’ailleurs un petit camaïeu de mes émotions de grand enfant…
Cette ancêtre aux bésicles globuleux est une Corre 1904, l’autre est une des toutes premières Renault. La troisième tout en hauteur est une de Dion Bouton, conçue pour accepter le port des haut-de-forme. N’est-ce pas prévenant de la part d’un constructeur que de penser à votre couvre-chef ?
Parmi les surprenantes, on trouve des marques encore plus inconnues, qui n’ont pas survécu aux années pionnières. Les clients sont bien ingrats, car avec ces constructeurs, il y avait de quoi rire sur les routes de France. Regardez à gauche ce barbecue posé dessus un grand landau, c’est une Noël Benet 1900 qui présentait la grande innovation d’avoir des freins à l’avant. L’autre est une Cottereau 1899, un constructeur dijonnais qui craignait apparemment le soleil si l’on en juge par son savoureux parasol à fanfreluches
Mais le visiteur n’est pas au bout de ses surprises. Car après le château et ses petites pièces où les vieilles guimbardes font office d’ameublement, on passe dans un grand hall qui est une caserne d’Ali Baba pour amateurs de vieilles antiques ( je ne parle pas de notre Président ). Une Ford T, un taxi de la Marne, une Berliet, une Brasier ( une homonyme de la mère qui a porté très haut les couleurs de la gastronomie lyonnaise ). Et puis soudain, le visiteur tombe en arrêt devant une petite Peugeot : la voiture de Gaston Lagaffe… Mignonne à croquer !
Dans cette collection d’oeuvres d’art, on est surpris par des détails imparables qui font éclater le travail de l’artisan derrière le pur engin de locomotion. C’est un univers de luxe, de bois, de cuir, avec des plaques de cuivre en signature pour revendiquer l’origine.
Et c’est ainsi qu’on arrive au clou de la visite : les véhicules d’exception qui ont brillé par leur luxe et leur exclusivité : une Bugatti, une Hispano Suiza, ou encore une Lancia de la belle époque… Des voitures belles à couper le souffle ! Pour un peu, on se prendrait pour Gatsby le magnifique…
Enfin, la voiture qui a marqué la collection de son empreinte, n’est pas la plus belle. Elle est célèbre par son ancien propriétaire, Adolf Hitler. Elle n’a pas la majesté d’autres pépites de la collection, mais tout le monde se souvient d’elle, après avoir visité le musée.
Au final, le musée de la Rochetaillée est la belle au bois dormant. Un musée chaleureux, unique où l’on resterait des heures à observer des détails de construction, fruit du génie humain. Il mérite le détour assurément… Et beaucoup plus sûrement que le parc Walibi !…