Quotidien putride de l’Occupation…

Le livre a remporté un joli succès d’estime. Le prix du meilleur polar décerné par le cercle du Point. Avec comme personnage principal, un anti-héros ordinaire, un flic des Renseignements Généraux pendant l’occupation allemande. Un salopard, collaborateur zélé et antisémite farouche qui a juste quelques très rares éclairs d’humanité. « L’affaire Leon Sadorski » est un livre qui déménage… De la littérature qui n’épargne pas ses lecteurs par le récit minutieux des puanteurs de la Collaboration. Le roman a eu droit pourtant à une suite un an plus tard.

On ne peut parler de ce livre sans évoquer le remarquable travail d’historien de l’auteur, Roman Slocombe qui replace son action dans le contexte précis des années noires de l’occupation. Tous les personnages cités ont vécu et sévi au service des intérêts allemands, et le plus souvent au service de leurs propres intérêts. D’ailleurs le livre s’inspire d’un inspecteur ayant raconté ses années de service.

Un roman inspiré de faits réels, ce qui lui donne une authenticité absolument unique. Jamais on n’aura vu les bassesses et les petites cuisines de la gestapo française et des flics collaborateurs sous un jour aussi crû. C’est d’une brutalité inouïe. L’inspecteur Sadorski est un salopard, entouré de repris de justice et de flics sans états d’âme. Toute la merde de l’époque qu’on a voulu enfouir à la Libération, souvent par l’exécution des collabos, refait surface. L’occasion de voir que quelques Français n’ont pas été blancs-bleus dans cette période troublée.

L’enquête est un prétexte pour raconter une période. C’est d’ailleurs la faiblesse du livre, cette volonté de raconter, de coller à la réalité et à l’original des mémoires du collabo et d’oublier sa propre dynamique. La première moitié du roman est un peu crispante car le récit fait une longue diversion sur un « séjour » subi par l’inspecteur collabo dans les geôles allemandes. Intéressant sur le plan historique, mais peu pertinent dans la trame du roman. L’auteur n’a pas su prendre un peu de hauteur et recentrer son enquête sur ce qui motive l’intérêt des lecteurs : une enquête de police dans un contexte original et peu connu.

Ce livre est prenant et percutant. Il nous surprend dans notre vision souvent un peu édulcorée des années de guerre.  Mais cette fange boueuse des années de collaboration ne donne pas forcément envie d’attaquer le second opus, « l’Etoile jaune de l’inspecteur Sadorski ».