Archives de catégorie : Litterature

Une panthère qui nous relie à la nature

Ce livre est la plus belle des évasions. Presque une thérapie… Je l’ai lu dans une période professionnellement difficile, avec des insomnies en cascades où mon seul répit était Tesson et sa quête improbable de la panthère des neiges. Quelle belle aventure !… Comment mieux évacuer les tensions que de partir dans cette expédition tibétaine glacée pour guetter un animal presque disparu, et donc quasi mythique ? Comment mieux relativiser les tracas de l’existence que de voir un groupe d’humains partir très loin, endurer des conditions extrêmes, souffrir du froid et de la fatigue, et épuiser tout son temps à la pratique la plus futile qui soit : espérer voir quelques minutes un animal sauvage dans son environnement. Ce livre est le récit de cette traque, mais c’est bien plus encore. Difficile de le résumer en quelques mots; disons que c’est, entre autres, une fable philosophique sur le rapport homme-bête et une dénonciation de la tyrannie de l’homme sur son environnement. Continuer la lecture de Une panthère qui nous relie à la nature

« Surface », comme un caviar de polar…

Le site Babelio où je reproduis mes articles, me fait découvrir régulièrement de bons romans. La dernière découverte est une excellente pioche.

« Surface » est un polar écrit par un ancien policier qui en est à son quatrième opus. Un homme qui connaît la musique, et qui en est d’autant plus crédible dans la description du monde de la police. C’est déjà un point positif. Encore faut-il savoir raconter des histoires. Et là, en l’espèce, nous avons affaire à un orfèvre.

Dans un style concis, sans fioritures, Olivier Norek nous campe le décor avec beaucoup de talent. Il ne faut pas plus de quelques pages pour être totalement dans le bain. Après, vous n’avez pas envie d’en sortir. L’eau sera depuis longtemps froide que vous serez toujours absorbé dans le récit. Continuer la lecture de « Surface », comme un caviar de polar…

Ennui au pays des « sans-dents »

Cela faisait longtemps que ce Goncourt 2018 trainait sur ma table de chevet, une lecture qui s’imposait, mais à laquelle j’avais du mal à me résoudre. Un titre tellement banal qu’il n’imprimait pas dans ma mémoire. Un récit de jeunes ados qui m’était totalement étranger. Un misérabilisme social qui était loin de me captiver… J’ai dû me forcer à cette lecture, notamment au début du roman.

Lecture faite, je suis toujours sur la réserve, mais je suis content de l’avoir lu. C’est assurément une grande oeuvre. Une chronique du quotidien, pleine de détails insignifiants, qui donnent au texte une authenticité unique. le récit est linéaire, sans faits d’armes autres que deux vols de motos. Les personnages vivent sous nos yeux, comme dans un film de Ken Loach. Je m’attendais à tout moment à un drame; tout concourait à un dénouement violent. Continuer la lecture de Ennui au pays des « sans-dents »

Loopings de lecture avec Musso…

Trop de polars nuit à la santé… C’est pourquoi je m’abstiens le plus souvent, préférant la grande littérature. Et puis, je ne suis pas très fan du trio Levy-Musso-Bussi qui squatte tous les linéaires avec leurs romans qui s’enchaînent comme des produits de consommation et sont dévorés comme des petits pains. Ils ont du talent, c’est certain, pour nous trousser des histoires, mais le suspense écoulé, que reste-t-il au lecteur ? Cela dit, si Bussi a quand même mes préférences, j’ai opté récemment pour le dernier Musso, « la vie secrète des écrivains » qu’on m’avait conseillé. Voilà un titre intrigant qui ne pouvait qu’éveiller ma curiosité.

Ce qui m’intéressait le plus, c’était le processus d’écriture d’un auteur à succès. Allait-on en savoir plus sur la genèse de ses best-sellers ?

Autant le dire tout de suite, Continuer la lecture de Loopings de lecture avec Musso…

Schmitt en mode mineur…

Plutôt que le journal d’un amour perdu, ce livre mériterait davantage le titre « autopsie d’un deuil ». Eric-Emmanuel Schmitt décortique, en effet, dans le détail les sentiments et la détresse que lui ont inspiré la disparition de sa mère. C’est extrêmement personnel, presque un peu trop, et l’auteur n’échappe pas totalement aux critiques d’un déballage un peu impudique. Même s’il le fait, en préservant l’anonymat de ses proches, qui ne sont cités que par leurs prénoms, sans que le lecteur puisse identifier les uns et les autres. Cela donne au récit un côté hors-sol, comme une bulle de conscience psychologique, détachée de tout son environnement. Un tête à tête avec soi-même, une confession sur le divan, totalement axée autour de la relation exclusive entre un monstre de notre littérature ( accessoirement mon écrivain préféré ) et sa mère adorée. Continuer la lecture de Schmitt en mode mineur…

Un ragout d’Histoire bien mitonné

Franz-Olivier Giesbert est un malin. Il écrit chaque semaine de beaux éditoriaux, très profonds, dans le Point. Mais tout le monde ne lit pas ce magazine. Aussi, pour s’adresser au plus grand nombre, rien ne vaut un beau roman, romanesque et historique. « La Cuisinière d’Himmler » étonne déjà avec ce titre inattendu. C’est une histoire fictive, mais qui s’inscrit dans son siècle, avec de nombreux personnages historiques comme protagonistes du récit. L’occasion de revisiter l’Histoire de manière légère, en compagnie d’un personnage attachant, Rose, une femme d’origine arménienne dont on va suivre toute la vie au cours des 360 pages du roman. Et quelle vie !…

Giesbert lui a inventé un destin aux petits oignons. Continuer la lecture de Un ragout d’Histoire bien mitonné

« L’été des quatre Rois »

« L’Eté des Quatre rois » se dit un roman. Coquetterie de style de l’auteur, car il s’agit bien là d’une chronique historique. Une excellente même, si vous voulez mon avis, tant on a l’impression de lire un quotidien de l’époque relatant dans le détail les événements de l’actualité. L’actualité d’une quinzaine de jours de l’été 1830 qui ont constitué ce qu’on a appelé plus tard « la révolution de juillet ». Une période assez méconnue, cette révolution-là étant moins riche que celle de 1789 et donc un peu négligée dans les cours d’histoire. C’est pourtant le second coup de boutoir de la République contre la royauté, et le début d’une grande confusion chez les royalistes entre légitimistes et orléanistes, antagonisme qui subsiste toujours près de deux cents ans plus tard. Voilà donc une bonne occasion de replonger dans notre Histoire, d’autant que l’épisode des Gilets Jaunes a montré la propension de notre peuple à s’échauffer très vite. Comme en cette année 1830, révolution-éclair qui n’a pas duré plus d’un mois…

Camille Pascal que j’ai eu la chance de rencontrer, Continuer la lecture de « L’été des quatre Rois »

Passé imparfait plus que parfait…

Julian Fellowes, né en 1949, est un touche-à-tout des médias. Le nouveau septuagénaire s’est essayé à beaucoup de choses, notamment le métier d’acteur, de scénariste et de romancier. Avant de remporter un beau succès avec Gosford Park dont on a fait un film, puis surtout de Downton Abbey qui fut un succès planétaire. Le scénariste chéri des plateaux n’a pas oublié d’écrire, et son roman « Passé imparfait » est son troisième livre. Un livre dans la veine de Downton Abbey, mais peut-être plus profond car sociologiquement très piquant.

L’histoire est savoureuse. Un sexagénaire célibataire, romancier à ses heures perdues, reçoit une invitation étrange à venir le voir d’un vieux copain de jeunesse, Damian, dont il s’était séparé violemment au point de le considérer comme un ennemi. Après toutes ces années, que lui voulait-il ? Continuer la lecture de Passé imparfait plus que parfait…

Dans la peau du tueur…

Grâce à Babelio, j’ai pu rencontrer Jacques Expert, auteur de polars que je ne connaissais pas. Un homme du monde des médias qui utilise ses expériences passées de journaliste de faits divers comme d’actes de guerre au service de son imagination qu’il a fertile. Il estime avoir au cours de ses pérégrinations professionnelles si bien côtoyé l’humain dans tous ses aspects, les lumineux comme les sombres, que l’écriture est devenue son activité principale. « Le jour de ma mort » est, si ma mémoire est bonne, son onzième roman.

Jacques Expert a un style d’écriture étonnant pour un auteur de polar. Il commence ses histoires sans savoir où il va. Il nous dit vivre avec ses personnages, et les laisse vivre, avant d’espérer retomber sur ses pattes dans la construction de l’intrigue. Continuer la lecture de Dans la peau du tueur…

« L’Alchimiste », littérature en apesanteur…

Le voilà ce livre magique qui a été un incroyable succès d’édition dans le monde entier. J’ai mis longtemps à céder à son appel. Folle indépendance ou stupide esprit de résistance face à la « vox populi ». J’avais tort. Ce livre est un merveilleux voyage.

C’est un roman, paraît-il. Allons-donc, c’est plus que cela. Et si le livre a eu un tel succès au point de mettre son auteur à l’abri du besoin pendant quelques siècles, c’est bien parce que le livre parle à chacun. Comme une parabole de la Bible, ou du nouveau Testament qui viendrait irriguer le monde de ses principes de vie. Ce livre a une dimension spirituelle lumineuse, comme un guide de vie pour homme ordinaire, afin de l’inciter à trouver sa légende personnelle. Autrement dit, le destin que lui réserve la Providence s’il sait être à l’écoute de celle-ci.

« L’Alchimiste » vaut mieux que tous les manuels d’accomplissement personnel. Continuer la lecture de « L’Alchimiste », littérature en apesanteur…

Rufin au service des oubliés de l’Histoire

Prendre un livre de Jean Christophe Rufin, c’est à coup sûr rentrer dans un monde riche, foisonnant, romanesque à souhait. Et dans une langue simple merveilleusement agencée au service de son histoire. Le style de Ruffin est, pour ainsi dire, aisément reconnaissable : court, nerveux, sans fioritures, mais doucement vallonné, comme pour épouser les courbes de son intrigue. Lire du Rufin, c’est s’enfoncer avec volupté dans l’Histoire avec un grand « H », une histoire toujours teintée de nationalisme car notre auteur-diplomate est farouchement français. Il aime mettre en exergue tous nos compatriotes obscurs qui ont fait la France, même si la postérité ne leur a jamais rendu grâce. Des aventuriers inconnus dont il aime à rappeler les rêves, les faits de gloire et les échecs.

Après Nicolas de Villegagnon ( « Rouge Brésil » ) et Jacques Coeur ( « Le Grand Coeur », livre que j’ai encensé sur ce site ), voici un autre aventurier mis à l’honneur, Auguste Benjowski, avec ce livre dont le titre paraît peu sérieux : « Le tour du monde du roi Zibeline ». Continuer la lecture de Rufin au service des oubliés de l’Histoire

Littérature dolorosa…

« My absolute Darling » : derrière un joli titre se cache un livre qui ne vous épargnera pas. Un livre coup de poing qui traite d’un dernier tabou, l’inceste. « My Absolute Darling » est un grand succès d’édition. C’est un grand livre, à n’en pas douter… Mais quelle douleur de poursuivre cette lecture ! Jamais je n’ai suivi le pourcentage de lecture de mon E-Book avec tant d’attention. J’étais pressé d’en finir, et en même temps, je ne pouvais pas en lire plus de quelques pages par session. Une vraie douleur…

L’histoire de Turtle, cette jeune ado, est pénible. Elle vit seule avec son père dans une maison déglinguée en rase campagne, près du bord de mer. Son grand-père vit lui dans un mobil home un peu plus loin. Le père est un salaud qui abuse de sa fille, tout en maintenant sur elle une emprise psychologique terrible. Turtle ne peut sortir de ses griffes, partagée entre un dégoût de ce qu’il lui impose et des vieux relents d’amour filial. Continuer la lecture de Littérature dolorosa…

L’auteur de tous les mots…

Sacha Guitry. Voilà un bonhomme incroyable qui aura marqué son époque. Il a traversé le vingtième siècle avec une double passion : celle du théâtre et celle des femmes. 124 pièces de théâtre créées pour mettre souvent en valeur l’une de ses cinq épouses, toutes comédiennes. Une telle gourmandise de la vie est rare…

Pourtant que savons-nous de lui aujourd’hui? Presque rien… Nos contemporains sont bien en peine de citer le titre d’une de ses pièces. Seuls ses aphorismes ont traversé le temps. On se les répète avec connivence, en faisant semblant d’adhérer au machisme et à la misogynie qu’ils traduisent. Ce faisant, Continuer la lecture de L’auteur de tous les mots…

Aurelie, combattante pour la planète

5 romans en 5 ans : Aurelie Valognes est une « serial writer » d’histoires intimistes, nourries à l’expérience de sa propre vie. J’avais aimé l’audace de son premier « Mémé dans les orties » qui évoquait un sujet hard : le quatrième âge, toutes ces personnes qu’on relègue le plus souvent dans des maisons de retraite pour ne plus les voir. Son personnage grognon et misanthrope de Ferdinand m’avait réjoui. Son vieillard était un vrai résistant.

Aurelie Valognes aborde un autre âge avec « la Cerise sur le gâteau », à savoir la soixante et le début d’une retraite mal préparée. Un âge qui suscite de nombreuses questions et remises en question. Un âge qui interpelle et inquiète en même temps. De quoi broder joliment une histoire aux fils blancs apparents. Avec l’assurance d’une identification immédiate du lecteur. Continuer la lecture de Aurelie, combattante pour la planète

Salinger, écrivain sur-estimé ?

Le voilà ce fameux chef d’oeuvre d’un écrivain maudit, Jerome David Salinger. Un écrivain mystérieux qui n’a écrit quasiment qu’un livre, « l’attrape-coeurs », avant de s’enfermer dans un anonymat de misanthrope endurci. Un livre que dans les écoles américaines, on lit consciencieusement. Les jeunes Américains grandissent avec ce livre. C’est une brique majeure du monument de la littérature américaine. Avec une telle réputation qui le précède, la déception n’en a été que plus forte !…

Ce livre est très pénible à lire. Son écriture parlée, avec une grammaire à la-va-comme-je-te-pousse, est très irritante pour un lecteur français, habitué des belles lettres. Certes, Continuer la lecture de Salinger, écrivain sur-estimé ?

Mort (d’un amour) à Venise

On savait depuis Lucchino Visconti que Venise n’était pas uniquement la ville des amoureux, et pouvait être aussi la ville nostalgique des amours contrariées. Laurence Vivares, pour son premier roman, exploite cette même veine avec « le vie a parfois un goût de ristretto ». L’histoire de Lucie, honteusement plaquée par son compagnon, qui se réfugie seule dans la ville de l’amour pour oublier son chagrin et exorciser une relation qui la possède encore.

Intimiste, ce livre l’est assurément. C’est surtout un exercice délicat où une femme s’abandonne à l’influence de Venise, tout en luttant contre un passé proche qui lui fait mal. Un roman très léger où il ne se passe pas grand chose, sinon le cheminement psychologique de l’héroïne. Une femme dynamique Continuer la lecture de Mort (d’un amour) à Venise

L’Histoire à la 1ere personne du singulier…

Est-il possible de tomber amoureux d’une femme morte il y a 550 ans ? En dehors d’un voyage dans le passé, cela paraît bien improbable. C’est à un tel voyage que nous convie Jean-Christophe Rufin avec « Le Grand Coeur », récit romancé de la vie de Jacques Coeur, le grand argentier de Charles VII. Un récit qui, entre autre, fait la part belle à Agnès Sorel, maîtresse du Roi, mais aussi femme libre avant l’heure. Une femme dont on ne connaît qu’un portrait dans un tableau de Fouquet.

Jean Christophe Rufin a eu la fameuse idée de sortir des oubliettes de notre passé le financier Jacques Coeur, qui a eu un parcours exceptionnel pour son époque, le milieu du XVème siècle. Un entrepreneur pionnier qui a construit une très belle fortune par le jeu du négoce et des échanges de marchandises.

Rufin a un lien particulier avec lui Continuer la lecture de L’Histoire à la 1ere personne du singulier…