
C’est la série élue « seconde meilleure série » de l’histoire… Un ami proche m’a confié que c’était même pour lui la meilleure. Je tournais autour de la chose, un peu perplexe : comment adhérer à l’histoire d’un trafiquant de drogue ? Peut-on prendre le parti du « bad », autrement dit du méchant autour de ce qui est un fléau de la société américaine, la drogue et les amphétamines ? Un « héros » qui ne deale pas, mais qui est d’abord un chimiste producteur d’une drogue synthétique redoutable… Le plus simple, après tout, c’est d’essayer un épisode sur Netflix.
Je me souviens bien de cet essai. C’était des images complètement décalées. Glauques au possible. J’imagine que beaucoup ont dû s’arrêter aux premiers épisodes. D’autres ont soupesé la réputation de cette série déjà ancienne qui est apparue au tournant des années 2010 et ont persévéré au-delà des trois premiers épisodes. Bonne pioche !…
Quel scénario !… L’histoire de ce père de famille souffrant d’un cancer qui « cuisine » de la drogue et instaure son trafic avec un jeune junkie au milieu des très dangereux cartels mexicains, est d’une grande puissance narrative. La série joue la carte du sympathique amateur dont la mort annoncée du fait de sa maladie fait sauter les dernières barrières morales. L’acteur Bryan Cranston est parfait dans ce rôle. Ingénu au départ, il se durcit au fil des épisodes pour finir sur un registre manipulateur et inquiétant.
Au delà de circonstances incroyables, mais crédibles, l’aventure se poursuit de manière inespérée. Le succès est joliment mis en valeur, et on oublie presque que l’activité est absolument criminelle. Il faut dire que le scénario est suffisamment bien tourné pour ne pas trop charger la responsabilité des deux héros dans les règlements de compte violents qui accompagnent leur ascension.
Le récit est toujours sur la corde raide. En effet, la femme aimante et le fils du chimiste ne savent rien de ses activités. Pour pimenter la chose, le beau-frère très proche est le responsable du bureau de la DEA, l’organisme anti-drogue à Albuquerque. Ce dernier lutte contre un trafic dont son beau-frère est l’instigateur. Voilà de quoi allumer la mèche d’une belle explosion familiale !
Les quatre premières saisons parlent de la montée en puissance du réseau. La cinquième, sans doute la plus aboutie, est celle de la chute. Cela part dans tous les sens, et les derniers épisodes sont un vrai jeu de montagnes russes. Le héros devient franchement antipathétique, même si son amour pour ses proches le classe parmi les « bons » méchants. Le dernier épisode est d’une grande intelligence émotionnelle. Avec une fin quasi parfaite…
Au final, le bilan est vraiment génial. Même si quelques épisodes se traînent un peu, il y a des accélérations inattendues qui donnent du peps incroyable à l’intrigue. Les acteurs vivent cette histoire à cent à l’heure, et le spectateur exulte à se soucier du sort d’ennemis publics au bien-être général.
Oui assurément, cette série mérite bien son classement. Si on accepte le postulat de l’élargissement temporaire de sa propre échelle des valeurs, ce qui n’est pas à la portée de tout le monde…
