Hommage aux héros italiens…

Un nouveau roman d’Arturo Perez Reverte est toujours un événement. L’auteur du « Tableau du Maître Flamand » et du « Maître d’escrime » est un auteur qui a assurément inscrit en lettres d’or son nom dans le Panthéon de la littérature européenne.

Son nouvel ouvrage me va droit au coeur car il parle des « oubliés » de la seconde guerre mondiale, ces soldats qui ont bataillé jusqu’au bout pour une cause qu’ils savaient perdue. Jean Christophe Buisson en a fait un très beau livre avec « Le Dernier Carré » en évoquant tous ces hommes qui, au fil des siècles, se sont battus pour l’honneur, sans espoir de victoire. Buisson avait oublié dans son livre les plongeurs italiens qui ont en décembre 1942 lancé des attaques très audacieuses en sous-marins de poche contre les navires alliés à l’ancre dans le port de Gibraltar. Un coup d’épée dans l’eau, car quelques mois plus tard, le régime fasciste italien était renversé. Qu’importe ! Il y avait là assurément un réel esprit de chevalerie. De quoi nourrir un roman s’inspirant de ces attaques, en s’affranchissant un peu du vrai déroulé des événements.

Avec son talent et sa capacité à jouer du temps et sa science du récit. Perez Reverte nous plonge dans un récit puissant qui tourne autour d’Elena, une femme espagnole qui se trouve mêlée à ces attaques et finit – un peu par amour – par adhérer à la cause italienne. Les plongeurs sont des hommes simples, placides, tranquilles qui prennent des risques considérables pour aller au plus près des bateaux ennemis et déposer sous leurs coques des charges explosives. Qui fait de la plongée, sait à quel point il est important d’y être détendu. En période de guerre, avec des Anglais qui se défendaient à coup d’explosifs lancées de manière aléatoire dans la baie, ce calme était une vraie gageure. Et pourtant, ils l’ont fait !…

Le livre raconte ces exploits et rend hommage à ces combattants italiens perdus dans la débâcle de leur pays. Des vrais héros qui n’ont fait que leur devoir, en portant haut leurs couleurs alors que les Italiens ont été globalement traités comme de piètres combattants, parfaitement méprisés par leurs adversaires. Cette réhabilitation d’une nation valait bien un livre.

Le livre parle aussi du destin d’une femme, veuve de guerre, qui dans un processus psychologique inconscient, devient espionne au service d’un pays qui n’est pas le sien. L’histoire est belle. Le contexte historique bien rendu. Le lecteur se laisse embarquer dans une histoire peu connue, très éloignée de notre quotidien. C’est un beau roman, sans doute un cran en dessous des précédents, mais ces soldats impassibles des fonds marins méritaient bien d’être rappelés à la mémoire collective. C’était des braves, parmi les plus grands…