La France, pays avec une agriculture forte, a su développer des champions de l’agro-industrie. Fleury Michon en fait assurément partie. Société familiale avec une approche responsable, de bons produits, une part de marché élevée face au concurrent Herta, jusqu’à peu filiale du très capitaliste groupe suisse Nestlé, le roi du jambon blanc Fleury Michon était une marque qui avait tout pour elle. Certes, le jambon sous blister n’aura jamais les faveurs des écolos, des gastronomes, sans parler des véganes. Il n’empêche, ce jambon est bon, pratique, et rend des services appréciables au célibataire d’un soir ou pour compléter un petit déjeuner.
Hélas, l’explosion de l’inflation a provoqué une perte des valeurs de cette entreprise. Le jambon est, en effet, un produit très concurrentiel, et peu de choses différencient les produits d’une marque à l’autre. Face à la hausse des coûts, les producteurs sont sous la pression des distributeurs. La guerre est totale… Fleury Michon a perdu sa sérénité. Pour garder un peu de pricing power, ils n’ont pas trouvé mieux que de se fournir très largement auprès de l’Espagne. Les porcs français qui constituaient le coeur de l’offre, se sont vus supplantés par les porcs espagnols, élevés intensivement par une agro-industrie qui est prête à toutes les turpitudes pour gagner des parts de marché.
Ainsi Fleury Michon qui revendiquait son soutien à nos agriculteurs, a transformé son modèle en catimini, pour devenir inféodé à l’Espagne. La société a quand même l’honnêteté de l’afficher, puisque tous ses produits rappellent l’origine de la viande. Une transparence cependant sans conséquence puisque beaucoup de Français ne regardent plus que le prix, et rarement l’origine des produits.
Ce n’est pas mon cas, et je viens de le signifier à l’entreprise. Ma fidélité très ancienne à la marque est remise en question. Quand on voit tous ces agriculteurs qui abandonnent leur métier, on ne peut pas ne pas se sentir concerné. L’équilibre de nos campagnes en dépend.
Je n’ai jamais oublié ce slogan, jugé obsolète pour beaucoup : nos emplettes font nos emplois…