Escale en Ecosse

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Tout le monde connaît la Saint Patrick, saint patron des Irlandais qu’on fête le 17 mars dans les pubs Irlandais à grands flots de bière et de Guinness. Mais qui connaît la Saint André ? La fête écossaise du 30 novembre est moins connue assurément, peut-être parce que les pubs écossais sont moins nombreux à Paris. On en compte quatre essentiellement, dont les célèbres Auld Alliance et The Pure Malt.

Mais c’est dans un tout autre repaire que j’ai fêté la Saint André. Un haut-lieu parisien du « beverage » écossais, « la Maison du Whisky », rue d’Anjou dans le quartier de la Madeleine. Sans doute la plus large cave à whisky de la capitale, un lieu qui aurait rendu fou Churchill ou Ernest Hemingway. Même les plus novices se sentent comme des gosses dans un magasin de jouets. C’est beau. C’est alléchant. Les étiquettes des bouteilles nous font voyager et la carte d’Ecosse nous donne des fourmis dans les jambes pour aller arpenter ce pays de cocagne.

Quel meilleur endroit pour découvrir la spécialité culinaire de l’Ecosse, le fameux haggis ? De la panse de brebis farcie qui explose sous le couteau écossais recourbé, avant de venir surprendre vos papilles. Des abats qu’on déguste avec un whisky des Highlands plutôt chatoyant après le whisky très tourbé de l’Ile d’Islay qui aura accompagné le saumon fumé. En tout cinq petits plats avec cinq whiskys différents. Hips…

Le haggis est, en tout cas, fidèle à sa légende. Une poche d’estomac de mouton remplie de fressure de mouton hachée ( coeur, poumons, foie ), de rognons, d’oignons et de flocons d’avoine. Un truc incroyable que les Ecossais accueillent à table en récitant un poème de Robert Burns. Quelque chose qu’on pourrait traduire ainsi :

Avec ta bonne et belle bouille rebondie,
De l’armée des puddings tu es le chef suprême !
Et tu prends dignement ton siège légitime,
Au-dessus des boyaux, des tripes, des andouilles,
Méritant bien un bénédicité
Aussi long que mon bras.

Tu remplis le plateau qui gémit sous ton poids,
Tes flancs puissants s’étalent comme une colline,
L’épingle qui te ferme pourrait faire l’axe d’un moulin
En cas de besoin ;
Et par tous les pores de ta peau, les essences distillent
Comme des perles d’ambre.

Un rude homme de labeur essuie sa lame
Et te tranche d’un coup de main habile,
Taillant dans tes nobles entrailles dégoulinantes,
Comme on creuse un fossé ;
Et alors, quel spectacle somptueux !
Quelle richesse ! Quel parfum glorieux !

Puis, tous donnant de la cuillère, tous y vont de bon cœur,
Et malheur au dernier ! On pioche avec bonheur,
Jusqu’à ce que bientôt les ventres distendus
Gonflent en forme de barriques ;
Et qu’un brave ancien, prêt à éclater,
Récite en soufflant l’action de grâce.

En existe-t-il un, penché sur son ragoût français,
Ou sur un des ces plats huileux à écœurer un porc
De dégoût, ou sur une de ces fricassées
À vous lever le cœur,
Qui puisse contempler l’air méprisant, le nez levé,
Un tel dîner ?

Pauvre Diable ! Regardez-le d’ailleurs, ce mangeur de chichis,
Mou comme une saucisse rabougrie,
Avec des mollets fins comme cordes à violon,
Des poings gros comme des noisetons,
Aussi capable d’un bon combat sanglant sur la terre ou la mer,
Qu’un mouton !

Regardez maintenant notre humble mangeur de haggis,
La terre tremble sous ses pas !
Son poing massif tient un large espadon
Qu’il sait faire siffler,
Faisant voler bras, têtes et mollets
Comme autant de fleurs de chardon !

Puissances qui sur l’homme veillez,
Et qui régentez son manger,
L’Ecosse ne veut pas de ces potions liquides
Qui clapotent dans un soupier ;
Mais si vous voulez ses prières laudatrices,
Donnez-lui un haggis.

Tout cela donne une envie irrésistible de partir en Ecosse, isn’t it ?