« Maryline », l’eau d’un puits profond…

Ce film m’a touché… C’est un superbe portrait de femme, authentique et puissant, porté par une jeune actrice incroyablement talentueuse. N’importe comment, un film de Gallienne ne peut pas être autre chose que profond, tant il est vrai que l’auteur des « Garçons et Guillaume, à table » sait merveilleusement capter les tréfonds de l’âme. Ce petit rien qui est le ressort de chacun.

Dans le cas de cette jeune femme, on le découvre lentement, car le personnage est mutique et fermé. Il s’en dégage une douleur secrète, un manque de confiance en soi, une pulsion destructrice… Gallienne nous promène de scènes en scènes, avec à chaque fois, une tension latente. Le spectateur n’est jamais libre de ressentir de l’empathie pour cette femme, pourtant très belle. Elle avance, mais sans jamais se départir de son fardeau. Serait-ce le propre d’un comédien, a fortiori d’un grand comédien, que de rester prisonnier de son conditionnement ? On voit que la question n’est pas si éloignée de son précédent film sur l’identité sexuelle.

Dans cet embarras permanent, Gallienne amène heureusement avec bonheur le personnage joué par Vanessa Paradis. Une bonne fée qui va dégager chez cette femme la noix de sa brou collante, sans réussir à casser la coquille pour arriver jusqu’au coeur. Le message qui se dégage subtilement, est qu’un comédien ne s’estime pas, il ne croit pas en lui, et doute constamment. Il a tendance à vouloir se faire mal, à s’abîmer. Jusqu’au jour où le public, par ses effusions, provoque une émotion incontrôlable. C’est la dernière image assez magique dans un restaurant. Et cette image légitime à elle-seule la souffrance de tout le film. Une fin libératrice qui survient au son suave de Vanessa Paradis sur une chanson de Leo Ferré. Un vrai bijou !

Au final, Gallienne n’a pas joué la facilité avec ce film, mais il porte au pinacle sa jeune actrice de la comédie française, Adeline d’Hermy. Il nous dit avec d’autres mots la difficulté d’être acteur. Mais on gage qu’il n’abandonnera jamais ces moments de souffrance et de torture. Ils sont sans doute la seule voie possible pour toucher au bonheur du sommet.